J’étais là
La figure de l’amiral William Daniel Leahy est bien connue en France. Né le 6 mai 1875, il parcourut d’abord une brillante carrière maritime qu’il termina comme commandant en chef des Forces navales et chef des opérations navales. Se retraite fut peut-être plus active encore. Ami du président Roosevelt, il fut nommé gouverneur de Porto-Rico, puis expédié à Vichy comme ambassadeur où il séjourna jusqu’en 1942. Enfin, de 1942 à 1947, il fut chef d’État-major personnel des deux présidents Roosevelt et Truman.
Le simple rappel de ces faits montre la richesse extraordinaire de son témoignage. Écrit en toute simplicité et sincérité, sans la moindre recherche stylistique, son livre contient d’inappréciables renseignements sur la partie peu connue et secrète de l’histoire des dix dernières années. Il fut à Vichy un observateur pénétrant de ces milieux si mouvementés. Il participa aux conférences qui jalonnèrent la seconde partie de la guerre, Washington, Québec, Le Caire, Téhéran, Yalta et Potsdam. Il put y observer le comportement de ceux qui avaient entre leurs mains le sort du monde : Churchill, Staline, Tchang-Kaï-Cheik. Enfin, pendant près de sept ans, il eut, chaque matin, une conférence avec les deux maîtres suprêmes de la politique américaine.
Les notes qu’il prit au jour le jour et ses souvenirs, d’une étonnante précision, forment la base de cet ouvrage remarquable. Cette netteté n’exclut d’ailleurs pas l’humour ni la franchise du jugement. Rappelons seulement celui qu’il porte sur quelques-uns de nos compatriotes les plus importants et sur Staline. Ne dissimulons pas non plus que, si discrète que soit l’expression de sa pensée, l’amiral fit d’expresses réserves sur les résultats diplomatiques et politiques auxquels aboutit la victoire militaire.