De Staline à Hitler, souvenirs de deux ambassades 1936-1939
La série des mémoires publiée sur la période d’avant-guerre et de la guerre même par plusieurs des représentants les plus importants de la France à l’étranger se poursuit par le livre consacré par M. Robert Coulondre à Staline et à Hitler. Cette contribution à l’histoire contemporaine se distingue par une franchise et une liberté de ton qui font de cette œuvre une lecture extrêmement suggestive. Robert Coulondre, ambassadeur de France, a été appelé à deux observatoires particulièrement importants pour toute la période qui précéda immédiatement le déclenchement de la crise mondiale puisqu’il fut successivement ambassadeur à Moscou et à Berlin.
De Moscou, il nous donne une série de tableaux brossés d’une plume alerte et des jugements portés avec une liberté d’esprit des plus sympathiques. Rien n’a échappé à l’œil vigilant et pénétrant de ce Provençal plein d’humour et de bon sens. Il ne se fait aucune illusion sur le régime, ni sur ses maîtres ni sur son chef suprême, mais il juge à sa juste valeur la puissance de cet immense État et l’effort déployé par ses maîtres en vue d’un conflit qui lui paraît de plus en plus imminent. Aussi est-ce avec un véritable désespoir qu’il voit la faute commise à Munich en tenant à l’écart de l’entente occidentale un partenaire de cette importance. Quand il est brusquement transplanté à Berlin où il remplace François-Poncet, lui-même muté à Rome, Coulondre se rend compte des dangers qu’offre pour l’Europe et la paix du monde l’esprit déséquilibré et mégalomane d’un Hitler et les illusions de son entourage.
Les pages qui décrivent les derniers jours de la crise diplomatique qui précéda le déclenchement du drame sont le pendant de celles où François-Poncet décrit à Rome le mouvement fatal où entraînèrent l’Italie l’orgueil d’un Mussolini et la duplicité d’un Ciano.