Rappelés au service
C’est vers les sommets à l’atmosphère sereine et aux vues lointaines, que le général Weygand attire ses lecteurs. Il nous décrit, en un style aussi vigoureux, précis et sobre que sa pensée, les événements dont il fut le témoin et l’acteur, laissant dans l’ombre les faits qui ont échappé à son contrôle, condition d’une loyale objectivité.
Nous suivons ainsi initialement à Beyrouth son action, qui tendait à ouvrir dans les Balkans le second front, dont nous privait le ralliement des Soviétiques à la cause nazie.
Puis, c’est l’heure du sacrifice stoïquement accepté : la réponse à l’appel du gouvernement aux abois. Placé à la tête de l’Armée le 20 mai 1940, le général expose la trame de son action personnelle, tant dans l’exercice de son commandement que dans les conseils du gouvernement. L’armistice auquel nous n’aurions pu nous soustraire qu’au prix d’une capitulation, lui apparaît comme le seul moyen, en sauvegardant l’Empire et la flotte, de les faire concourir, le moment venu, à la libération. C’est à la préparation de ce recours aux armes que le général consacre sa mission en Afrique du Nord : réorganisation officielle et clandestine de l’Armée, accord avec les États-Unis, obstruction à l’activité des organes de contrôle de l’Axe et aux mesures de faiblesse de Vichy. En novembre 1941, les Allemands exigent son retour.
Étroitement surveillé, il reçoit, en janvier 1942, un message personnel du président Roosevelt qui lui demande son concours dans une action alliée en Afrique du Nord. L’appel aux armes va ouvrir un glorieux champ d’action à l’Armée d’Afrique, dont la réorganisation fut son œuvre. En prendra-t-il le commandement à l’arrivée des libérateurs ? En raison de son âge, Giraud lui paraît plus qualifié. Il s’efface devant lui et, en un ultime sacrifice, victime de l’esprit d’obéissance, il est arrêté le 11 novembre 1942 par les Allemands.
Œuvre d’un grand écrivain, du classicisme le plus pur, cet ouvrage, de par la précision des témoignages qu’il nous apporte, de leur stricte et loyale objectivité, projette sur les événements si confus de 1940-1942 une lumière qui satisfait nos intelligences en étayant leur jugement.