Grandeur ou décadence du Plan Marshall
Pour l’auteur le déséquilibre des échanges entre l’Europe et les États-Unis est fondamental, irrémédiable. Il faut donc, non pas chercher à le supprimer, mais à le compenser. Le système proposé est le suivant : les pays européens se délieraient de leurs dettes envers les États-Unis en exportant vers les pays arriérés qui, grâce à leur développement économique, pourraient rembourser les États-Unis.
Comme l’a remarqué M. Tardy, l’idée est ingénieuse, mais le postulat sur lequel elle se fonde est contestable. En disant que « l’Amérique ne peut pas se fournir à elle-même un pouvoir d’achat suffisant », l’auteur prend parti, sans nous en donner les raisons, dans la déjà vieille querelle sur la dynamique du système capitaliste et sur les économies de maturité. D’un autre côté, l’affirmation de l’irréductibilité du déficit se heurte à l’existence de cette dynamique des investissements extérieurs mise au jour par le professeur Weiller, ainsi qu’à la réversibilité de l’effet de domination découvert par le professeur Perroux, voire à l’action de l’invisible hand retrouvée par Keynes dans son dernier article. L’ouvrage n’est pas, au surplus, exempt de certaines contradictions : si, comme il le dit à la page 31, « l’ancien système multilatéral est menacé par l’industrialisation croissante des diverses régions du globe », on ne voit pas très bien quelle pourra être l’utilité pour les États-Unis du développement économique des pays arriérés. La vérité, comme l’a depuis longtemps fait remarquer M. Rist, est que les meilleurs clients des pays industriels sont les pays industriels eux-mêmes, ce qui ruine une partie de l’argumentation de M. Lévy Jacquemin.
Dans son introduction l’auteur déclare qu’on aurait tort de croire que l’Économique d’aujourd’hui est une science compliquée. C’est peut-être parce que l’Économique d’aujourd’hui est plus compliquée qu’il ne le croit, que son livre appelle ces quelques réserves.