Le Canada, puissance internationale
Il y a déjà trente ans, qu’à la suite de trois voyages, André Siegfried, qui est un des trop rares Français qui connaît, pour l’avoir parcouru, le monde entier et surtout l’anglo-saxon, publiait un livre intitulé : Le Canada, les deux races (problèmes politiques contemporains). Le sujet avait besoin d’être repris à la lumière des enseignements de la guerre mondiale qui a bouleversé l’univers. L’éminent académicien a ajouté à son ouvrage primitif un certain nombre de chapitres puisés aux meilleures sources et inspirés par une connaissance personnelle du sujet.
Le Canada actuel, comme la plupart des Nations du Monde, traverse une crise de renouvellement. Les deux races continuent à s’affronter, mais se supportent, sans pour cela constituer, semble-t-il, une véritable nation. Celle qui nous intéresse de plus près, la française, subit une transformation profonde du fait de l’influence presque irrésistible de l’américanisme. Si les liens sentimentaux du Canada avec l’Empire, ou plutôt le Commonwealth, se sont resserrés par suite de la lutte commune, si le loyalisme au système britannique demeure entier, il n’y a pas toutefois à se dissimuler que l’intimité physique entre le Canada et les États-Unis s’est singulièrement accrue. André Siegfried y voit peut-être un danger pour l’avenir de la Communauté britannique. Il n’en reste pas moins que, comme la Belgique, le Canada, création originairement précaire, a toutes chances de se maintenir indéfiniment. Il est devenu, grâce à l’essor industriel provoqué par la guerre, une puissance mondiale, dégagée de l’Europe mais restée en contact avec elle par sa culture, et, en grande partie, par sa culture française.