À Berlin : journal d’un correspondant américain 1934-1941
William Shirer est un de ces magnifiques collaborateurs de la presse américaine qui, avant et pendant la guerre, ont vécu les instants les plus décisifs de l’histoire européenne et mondiale. Comme certains de ses confrères, William Shirer a vécu uniquement pour sa profession ; mais celle-ci est dotée aux États-Unis de tels moyens matériels, elle comporte une telle liberté physique et spirituelle que c’est en toute indépendance qu’elle peut s’exercer.
Aussi, dans les deux parties de ce livre capital « Prélude à la guerre » et « La guerre », lisons-nous, notées jour par jour par notre confrère pour son usage, sans même, nous le croyons volontiers, qu’il put espérer les voir publier, ses impressions les plus franches et les plus naturelles sur son existence à Berlin, dans le Berlin où se préparaient déjà la crise d’une Europe presque à l’agonie et la défaite irrémédiable de ceux qui l’avaient provoquée. Shirer ne cache en aucune manière l’aversion quasi physique, que lui a inspirée Adolf Hitler, mais il ne dissimule pas, non plus, l’impression profonde que lui ont causée, en dépit de son nazisme brutal, sa clarté d’esprit et son acuité de volonté, inconnues depuis Napoléon.
Ce livre se lit, en outre, comme un véritable roman car ce grand journaliste, à ses heures théoricien politique, se double, en même temps, d’un reporter intrépide. Nous le suivons à Londres, à Rome, à Vienne, lors de l’Anschluss, à Prague, lors de l’annexion, à Varsovie, à Bruxelles, à Paris et à Rethondes, jusqu’au moment de l’entrée en guerre des États-Unis contre l’Allemagne. C’est tout l’envers du décor germanique qui défile, ainsi, sous nos yeux.