Douze ans dans la tourmente
Nous avons eu souvent l’occasion de noter quelle importante contribution à l’histoire générale constituent les grands reportages de nos confrères anglo-saxons dans le monde entier pendant les périodes décisives de crises qu’il a traversées récemment. M. Roman Fajans, rédacteur du Courrier de Varsovie, mérite, par son activité et par le livre qui la résume au cours des douze années, de prendre place dans cette brillante phalange.
Il a connu les dirigeants de l’Italie fasciste : Balbo, si séduisant, et dont la mort mystérieuse semble bien due à une condamnation de Mussolini, ce dernier mégalomane et péremptoire ; Ciano : fasciste ardent et vaniteux qui apparaît beaucoup moins raisonnable que dans son journal – qui pourrait, bien avoir été remanié in extremis pour les besoins de sa cause – ou tel qu’il apparut plus tard à notre collaborateur François-Poncet ; Henlein, Führer des Sudètes, personnification de l’hypocrisie ; Mgr Hlinka, vieux politicien slovaque pour lequel il n’y avait pas de danger allemand ; les chanceliers autrichiens Schuschnigg et Renner ; le tout-puissant Tchang Kaï Chek ; le « Quisling mongol » Te Wang : tous défilent devant nous, campés en traits inoubliables.
L’auteur traverse Kouybychew, capitale de l’URSS en guerre, l’Iran, la Grèce ; il s’enfonce au cœur du monde arabe, parcourt les fronts d’Italie, explore la tragique Palestine, jauge avec pitié les misères de la Grèce, admire le redressement turc. C’est dire l’intérêt exceptionnel des sujets et des scènes exposés par ce grand journaliste, qui sait aussi bien décrire qu’observer.