Masséna, l’enfant gâté de la Victoire
Le nom de Masséna est l’un des plus glorieux de notre histoire militaire. Avant de devenir, avec Davout, le plus actif et le meilleur des lieutenants de Napoléon, avant de sauver l’armée à Essling, de permettre, par son invincible résistance dans l’île Lobau, la victoire de Wagram, le général de la Révolution, le grimpeur des cimes, l’intrépide soldat de Castel-Gineste et de Loano, le bras droit de Bonaparte à Rivoli, le vainqueur de Zurich qui préserva son pays de l’invasion, le héros du siège de Gênes, avait déjà fourni les preuves de ses talents guerriers.
L’homme, cependant, et son caractère nous étaient mal connus. Ignorés ou presque, les obscurs débuts au Royal Italien, de ce 3e enfant d’une humble famille niçoise, les premiers déboires de sa carrière, son mariage de surprise, sa lassitude et son découragement, jusqu’au moment où la Révolution le pousse vers les sommets. S’aidant de documents découverts et puisés dans les archives du Var et les archives municipales d’Antibes, notre collaborateur Amédée Augustin-Thierry est parvenu à éclairer ces demi-ténèbres, à projeter la lumière dans cette période nébuleuse de la vie du futur maréchal duc de Rivoli, prince d’Essling.
Sans négliger pour autant son histoire militaire, avec la forme attrayante et vive qui lui est propre, l’auteur de Madame Mère et de Notre-Dame des Colifichets s’est attaché principalement à nous restituer la physionomie morale et la psychologie de son personnage.
Tous ces grands soldats de la Révolution et de l’Empire, sabreurs et meneurs de charges, ne furent pas moins d’enragés coureurs de cotillons. Il n’est, pour s’en convaincre, que de lire les Mémoires qu’ils nous ont laissés : ceux par exemple de Thiébault, de Griois ou du colonel Parquin. Cynique ou naïf, le récit de leurs exploits amoureux revient presque à chaque page. Masséna ne fait point exception à la règle. L’énumération de ses bonnes fortunes prend place à côté de ses victoires et conquêtes. Les travers de l’homme, son amour de l’argent et son avidité, toutes les fautes énoncées par le Mémorial ne sont pas non plus dissimulées : le portrait est complet et attachant.