Souvenirs et solitude
C’est un beau livre que Souvenirs et Solitude de l’ancien ministre Jean Zay qui, précédé d’une préface de Jean Cassou, a été publié par les soins pieux de son ancien collaborateur Marcel Abraham. Cette « tapisserie » – c’est le nom que Jean Zay donnait dans ses lettres à ce travail – fut tissée par lui pendant les quatre années d’injuste emprisonnement qui lui furent infligées avant son meurtre par les tueurs de Darnand. Nous voyons s’y révéler, jour par jour, une âme généreuse, un esprit brillant et solide, un analyste de classe.
Jamais, depuis le livre classique Mes Prisons, l’état psychologique du prisonnier n’a été, semble-t-il, disséqué avec autant de lucidité. Mais le livre a une importance directe pour l’historien des années qui précédèrent la guerre. Ses fonctions officielles de sous-secrétaire d’État et de ministre ont permis à Jean Zay de bien voir et aussi d’entendre, dans des moments d’une importance vitale pour l’histoire de ce pays. Certaines scènes sont évoquées et jugées par lui avec une précision et un pittoresque incomparables. Il apportera un témoignage précieux à celui qui entreprendra de fixer dans le détail les causes qui ont abouti à la crise européenne de 1939.
À cet égard, Souvenirs et Solitude sont plus qu’une confession personnelle. Ils contiennent des pages qui révèlent un politique et un historien.