En janvier dernier, l'auteur nous avait fait profiter de ses connaissances sur Taïwan, cette « autre » Chine. Diplômé de l'Institut national des langues et civilisations orientales (Inalco) et de l'Institut américain de Taïwan, ce passionné de l'empire du Milieu et de ses habitants nous explique maintenant pourquoi ce n'est pas la conquête de la démocratie qui constitue la préoccupation essentielle des 800 millions de paysans chinois, mais l'autosuffisance alimentaire : si celle-ci n'est pas assurée, ce sera la fin de la « dynastie communiste ».
Les paysans chinois et la démocratie
Les événements du printemps 1989 à Pékin ont très largement mobilisé les médias occidentaux qui, troublés par l’apparition sur la place Tien-an-Men de banderoles réclamant la liberté et la démocratie, ont cru pouvoir présenter le soulèvement de la capitale comme les prémisses d’un processus révolutionnaire devant conduire à la chute du régime.
Sans doute les difficultés des communistes dans certains pays de l’Est avaient-elles servi de référence pour justifier une telle interprétation. Peut-être une partie des étudiants, sensibles aux idées occidentales, encouragés par l’inertie d’un pouvoir initialement désemparé, ont-ils pu croire de bonne foi que l’heure de la démocratie allait pouvoir sonner pour la Chine. En fait, le mouvement des universitaires, appuyé par les ouvriers et le petit peuple de Pékin, tellement sympathique parce qu’il était à la fois organisé, pacifique et chargé d’espoir, était voué à l’échec à cause d’un malentendu et d’une absence.
Malentendu entre d’une part les premiers acteurs des manifestations : les étudiants qui, grisés par les succès initiaux et la force des symboles, imaginèrent peut-être que la volonté de liberté et de démocratie pouvait avoir assez d’impact pour faire plier le pouvoir ; et d’autre part les ouvriers et la population de Pékin qui manifestaient, non pas pour une révolution démocratique, mais pour réclamer de meilleures conditions de vie.
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