Editorial
Éditorial
2016-1916. Un siècle de sang et de feu avec la bataille de Verdun, symbole de l’inhumanité de la guerre où Français et Allemands s’affrontèrent durant des mois, les uns pour empêcher la chute d’une ville dont l’importance stratégique avait été négligée et pour les autres, il s’agissait d’épuiser l’ennemi pour l’amener à négocier, avant de basculer l’effort contre l’Empire des Tsars.
Verdun a concerné toutes les générations en son temps, les Poilus, au Front, et les familles, à l’Arrière, avec la litanie interminable des morts – père, fils, frères… – pour la France. Ainsi, moins de dix communes n’ont pas de monuments aux morts, épargnées par le hasard des guerres. 13 novembre 2015, des hommes et des femmes – de la même tranche d’âge que les Poilus de Verdun – ont été frappés par le hasard terrible du fanatisme de terroristes islamistes venus pour tuer. Avec une dimension nouvelle, l’a-humanité des meurtriers pour qui la mort est plus importante que la vie. Pour nos sociétés occidentales, c’est un changement stratégique majeur. Les espoirs du monde post-guerre froide auront à peine duré deux décennies avant de se fracasser sur de nouvelles confrontations pour lesquelles le monde occidental ne semble plus dorénavant en mesure d’assumer un leadership incontesté. La multipolarité actuelle impose de réfléchir et de revoir notre posture stratégique en relevant notre niveau d’ambition. Après des années de réduction des budgets et donc de nos capacités, la courbe a été inversée avec la conviction que le temps des « dividendes de la paix » était largement révolu. Ce que la France a décidé – en appui des engagements comme au Mali depuis janvier 2013 et contre Daech – n’est pas un acte isolé. Il y a désormais une prise de conscience européenne – à commencer par le Royaume-Uni – que la Défense est redevenue une priorité. Le retour de la puissance est une réalité. Londres, qui pendant des années de désinvestissements couplés à l’épuisement des forces consécutivement à l’Afghanistan et l’Irak, a décidé de reprendre sa place comme un acteur militaire de premier rang avec la réaffirmation du rôle central de la dissuasion nucléaire militaire, la confirmation de la mise en service des deux porte-avions et le retour des patrouilles aéromaritimes pour contrer le retour des sous-marins russes. Un parfum de nouvelle guerre froide car l’attitude actuelle de la Russie reflète une ambiguïté inquiétante et déstabilisante de la part de Moscou.
Anticiper ces menaces, répondre à l’affrontement imposé par Daech, aider nos partenaires et alliés à renforcer leur défense, autant de défis que la France a décidé de relever, en s’appuyant sur ses armées, directions et services, ainsi que sur les forces de sécurité intérieure avec un nouvel effort budgétaire. Mais aussi en renforçant ses capacités d’analyse, notamment en termes de recherche stratégique. Un champ de réflexions et de travaux auquel la RDN apportera son concours avec l’expression et la mise en valeur du débat stratégique. Une exigence envers tous ceux qui ont combattu pour la France, au cours de ce siècle, en particulier les Poilus de Verdun ; Verdun symbole de la réconciliation franco-allemande, indispensable pilier de la paix en Europe, paix qu’il convient désormais de protéger avec courage. ♦