Editorial
Éditorial
Ennemi, guerre, terrorisme, djihadisme… Ces mots résonnent désormais partout au quotidien, dans les médias, dans les discussions et au café du commerce comme si cette réalité violente était redécouverte par une opinion publique jusqu’à présent anesthésiée face à ces menaces. La sidération provoquée par les attentats de janvier puis de novembre 2015 a montré que la cible était désormais la communauté nationale dans sa diversité, au risque de confusions et d’amalgames dans un contexte géostratégique marqué par le désordre mondial et l’absence de leadership.
En effet, cela fait des années que nos armées sont confrontées dans les théâtres d’opérations à des ennemis dont la volonté agressive est un fait quotidien, hier en Afghanistan, aujourd’hui dans la bande sahélo-saharienne ou en Irak et en Syrie. Travailler sur la conflictualité pour mieux la comprendre, et donc la combattre, reste cependant essentiel car si les fondamentaux de la guerre demeurent, l’éventail des actions s’est élargi avec de nouvelles cibles, réelles comme notre société, virtuelles à travers la propagande sur les réseaux sociaux visant à recruter de futurs terroristes. Du Scalp-EG à Facebook, la guerre est protéiforme, hybride pour certains. Ce terme, apparu il y a peu, a suscité de nombreux écrits et recherches sur la pertinence de ce concept. Il était donc légitime que la Revue Défense Nationale y consacre son dossier alors même que la France est en guerre face à la menace islamiste, par nature hybride, tant à l’extérieur que sur le territoire national. À cet égard, le colloque récent du Centre de doctrine d’emploi des forces (CDEF), dont certains articles en sont l’écho ici, a bien montré l’ubiquité de cette menace et donc le besoin d’une adaptation permanente de notre doctrine et de nos modes d’action, avec cependant un préalable trop souvent négligé, celui d’avoir les moyens suffisants pour s’engager.
L’hybridité n’exclut pas de rappeler qu’au-delà des effets de mode, des réalités existent comme les règles juridiques d’engagement de nos forces dans le cadre de Sentinelle. Il est clair qu’un besoin d’adaptation se pose alors même que l’adversaire est désormais prêt à mourir pour sa cause. Le débat, déjà présenté dans le numéro de janvier, se poursuit ici, en attendant de prochaines décisions interministérielles sur la mission des armées en France même.
L’incertitude stratégique, qui est désormais la règle, n’est pas prête d’être levée. Bien au contraire, elle ne va cesser de se complexifier avec de nouveaux défis. La dégradation accélérée en Syrie et en Irak, avec l’intervention russe en soutien du régime de Damas et la volonté turque d’en finir avec la rébellion kurde, ne peut qu’inquiéter. La montée en puissance de la Russie – malgré les sanctions et la crise économique – marque un retour à une nouvelle forme de guerre froide – hybride. Cette dégradation est accentuée par la paralysie de la politique étrangère américaine due à la campagne présidentielle pour les élections de novembre. Il en sera bientôt de même pour notre pays. Plus que jamais, les enjeux de sécurité extérieure devront être pris en compte avec un vrai débat, de vraies propositions et de vrais engagements. La RDN apportera sa contribution. ♦