Les récentes attaques terroristes en France obligent à réfléchir au cadre juridique d’engagement des armées sur le territoire national en proposant une nouvelle approche plus réaliste face à des adversaires déterminés à tuer. Les enjeux sont complexes et méritent une remise à jour de la notion de légitime défense.
Principes et problèmes juridiques de l’engagement des forces armées dans la sécurité du territoire national
Principles and Problems of Jurisdiction Concerning the Engagement of Armed Forces in the Security of National Territory
Recent terrorist attacks in France necessitate reflection on the juristic engagement of the Armed Forces on national territory by proposing a new and more realistic approach facing adversaries determined to kill. These issues are complex and merit a modernization of the notion of a legitimate defense.
La sécurité du territoire national relève du président de la République et incombe au gouvernement sous la direction du Premier ministre qui dispose, par la Constitution et le code de la Défense, de plusieurs régimes juridiques permettant de préparer le pays à une menace, intérieure comme extérieure, et d’y faire face. Dans cet environnement, l’engagement des forces armées sur le territoire national est quotidien dans les trois milieux : aérien, maritime et terrestre. Dans les deux premiers, elles sont primo intervenantes en s’appuyant sur des capacités opérationnelles que ne possèdent pas les forces de sécurité intérieure qui peuvent toutefois être en soutien, notamment pour l’aspect juridique. Dans le milieu terrestre, à l’inverse, les forces armées agissent en soutien des forces de sécurité intérieures.
Un cadre juridique prépondérant : la légitime défense
Dans chaque milieu, et en dehors des régimes d’exception de la réquisition au maintien de l’ordre ou de la réquisition complémentaire spéciale, de l’article L.2338-3 du code de la Défense à la disposition des gendarmes et des zones de défense hautement sensibles (ZDHS), le cadre légal prépondérant pour l’emploi de la force et l’usage des armes est celui de la légitime défense, tant celle des personnes au sens de l’article 122-5 du Code pénal qui encadre toute intervention d’un acteur pour faire cesser une menace contre lui-même mais aussi autrui, que celle de l’État, au sens de l’article 51 de la Charte des Nations unies, qui confère à tout État la légitimité pour ordonner de mettre fin à une menace, par l’emploi de la force, y compris, lorsque cela s’avère nécessaire, par l’usage des armes.
Si le cadre juridique est le même dans les trois milieux pour l’engagement des forces armées, pour autant, l’organisation des missions qui leur incombent est différente. L’action de l’État en mer et la posture permanente de sûreté aérienne sont organisées par des textes interministériels. La Marine nationale et l’Armée de l’air y sont primo intervenantes, tout en s’appuyant sur un réseau interministériel et international d’échanges d’informations. Elles disposent de mesures dites de sûreté qui permettent une classification de la menace. Le contrôle d’identité ou de nationalité, l’identification visuelle ou radio et la contrainte d’itinéraire permettent en effet d’amener une menace potentielle à se dévoiler. Informée de l’agression en cours ou d’un péril imminent, l’autorité peut alors décider de l’emploi de la force, voire de l’usage des armes, par des mesures de coercition avec la reprise de vive force à la mer, l’arraisonnement dans les airs, les tirs de semonce ou encore les tirs au but ou de destruction. Le Premier ministre reste le seul à pouvoir décider de l’usage des armes : tir au but (action de l’État en mer) ou tir de destruction (sûreté aérienne).
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