Les grandes figures de l’Iran
Les grandes figures de l’Iran
Après leurs biographies de Shah Abbas, empereur de Perse, paru en 1998 et Mohammad Reza Pahlavi, le dernier shah, en 2013, les deux auteurs se sont attelés à une tâche plus vaste : présenter une image différente de l’Iran au travers de quelques personnalités emblématiques, symbolisant la continuité parfois chaotique et la pérennité exceptionnelle d’une nation, d’une culture et d’une civilisation parmi les plus anciennes du monde. Par-delà l’histoire, c’est surtout l’inanité, ces « continuités iraniennes » qu’évoquait le grand philosophe Henry Corbin, continuités souterraines irriguant aujourd’hui encore le paysage troublé d’un Iran qui se cherche.
Les auteurs expliquent leur choix des grandes figures iraniennes. Zarathoustra, Cyrus et Darius ne pouvaient être laissés de côté tant leurs rôles sont fondateurs sur le plan de la pensée et de la constitution même de l’entité iranienne. Pour le reste, ils ont dû procéder à des choix qui s’apparentent parfois à de véritables jugements de Salomon. Plutôt que Mithridate II, souverain guerrier au palmarès impressionnant, appelé le « Grand », ils ont préféré Mithridate Ier, réformateur, pacificateur, mécène et un être de tolérance dont l’œuvre réformatrice d’un État en miettes leur a semblé exemplaire. Les autres choix ont été plus aisés. Comment ne pas mentionner Chapour Ier, le grand vainqueur de l’empereur romain Valérien. Pour la période après l’invasion arabe, ils ne pouvaient passer à côté de deux figures intellectuelles, Ferdowsi et Avicenne. Si la poésie et la médecine iranienne brillent encore aujourd’hui dans le monde c’est grâce à eux. L’Iran ne s’est pas fait seulement qu’avec ses guerriers et ses conquêtes. Il a marqué son identité par ses produits de l’esprit, sa poésie, écrivains, penseurs, soufis ou non, comme Omar Khayyâm, Razi, Molavi, Hafez et Saadi, les deux poètes qui immortalisèrent Ispahan.
Les têtes couronnées ne sont pas les seuls à peupler cet ouvrage à la lecture limpide qui remet toujours ces personnalités dans leur contexte historique, géographique, social et culturel. Pour les Safavides, l’aura d’un Shah Abbas s’est imposée. Il a été impossible de passer sous silence aussi Nader Shah et Agha Mohammad Shah, tant leur personnalité dépasse leur fonction, mettant à nu les arcanes de l’âme humaine. Reza Shah, enfin un des fondateurs de l’Iran moderne, clé de la sélection des auteurs, son action courageuse, mais critiquée, voire combattue, a permis à l’Iran de retrouver une place dans le concert des nations, ce qu’il a payé de sa personne.
Dans leur recension des grandes figures de l’histoire iranienne aucune femme ne figure. Pourtant deux impératrices ont régné brièvement à la fin des Sassanides. Mais aucune impératrice régnante, ni épouse impériale n’a vraiment marqué l’histoire. L’islam ensuite, en reléguant les femmes hors des sphères du pourvoir, a empêché l’éclosion de figures marquantes, même si l’histoire parle d’une ou deux « reines mères régentes ».
L’Iran d’aujourd’hui est « l’aboutissement d’un long passé d’efforts, de sacrifices et de dévouements » comme l’écrivait Ernest Renan, mais aussi d’événements exceptionnels et d’erreurs, de choix politiques et culturels, d’émergences de rois, de poètes ou de savants, de victoire et de souffrances. ♦