La situation sécuritaire au Mali n’est guère encourageante malgré les efforts fournis par nos forces. Les actions multinationales ne sont pas efficaces, voire inutiles, face aux carences du régime incapable de se réformer. Cependant, baisser les bras laisserait le champ libre à une déstabilisation chaotique pour la région et l’Europe.
Mali, une guerre sans fin ?
Mali—a Never-Ending War?
It can hardly be said that the security situation in Mali is encouraging, despite the great efforts of our various forces. Multinational action has been ineffective, useless even, in the face of the deficiencies in a regime incapable of reforming itself. That said, to put down arms would leave the field free for destabilisation that would cause chaos in the region and in Europe.
La France, les États-Unis et l’Union européenne apportent depuis quatre ans soutien et formation à l’armée malienne, mais cette armée est manifestement toujours incapable de contenir le développement de l’insécurité dans ce pays. La Mission multidimensionnelle intégrée des Nations unies pour la stabilisation au Mali (Minusma) qui compte plus de 13 000 hommes, est au Mali depuis quatre ans. Elle y a payé le prix du sang, ayant perdu plus de 150 hommes, ce qui en fait la mission la plus dangereuse des quinze opérations de maintien de la paix en cours dans le monde. Mais cette force est largement recluse dans des bases dont elle ne sort qu’avec de grands risques. Dans ces conditions, l’armée française semble la seule force structurée capable de « tenir » le Mali. Alors, les soldats de l’opération Barkhane sont-ils condamnés à rester des décennies pour éviter le retour des djihadistes ? Ou pouvons-nous espérer que la force multilatérale du G5 Sahel permettra d’assurer sa relève et à nos soldats de rentrer chez eux ?
L’inefficacité des forces de maintien de la paix des Nations unies est souvent dénoncée, et celle de la Minusma ne fait pas exception. Thierry Vircoulon de l’Institut français des relations internationales (Ifri), un ancien d’« International Crisis Group », a récemment publié (1) une analyse particulièrement dévastatrice des raisons de l’inefficacité de ces opérations qui « s’enlisent et perdent leur sens », et qui « incapables de régler les conflits se contentent dorénavant de les accompagner dans la durée ». Pour lui, ces forces qui « n’ont que l’apparence d’une armée », souffrent d’une absence de cadre stratégique de résolution des conflits, de limites si strictes dans l’application de mandats déjà bien restrictifs qu’ils les confinent à l’impuissance, et d’une doctrine désormais inadaptée à la nature des nouveaux conflits intra-étatiques.
L’inefficacité de l’armée malienne soulève un autre type de question sans doute plus inquiétant. Comment cette armée qui a reçu formation, assistance technique et équipement ne parvient-elle toujours pas à constituer une force crédible ? En fait, dans un pays comme le Mali, ce fameux triptyque « formation, assistance technique et équipement » ne s’adresse qu’aux symptômes de l’inefficacité de toute institution publique. Dans les pays multiethniques et fragiles comme le Mali, ces institutions publiques visent en effet moins à fournir un service spécifique, qu’il s’agisse de sécurité, de fourniture d’eau, d’électricité ou de santé, qu’à offrir des emplois à des réseaux politiques, claniques ou ethniques et cela du haut en bas des pyramides hiérarchiques. L’armée malienne n’échappe pas à cette contradiction.
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