La marine indienne, confrontée au Pakistan et surtout à la Chine, affiche des ambitions certaines mais des moyens modestes et une modernisation en suspens face à des difficultés techniques. New Delhi veut pouvoir surveiller ses espaces maritimes mais aussi contrer l’influence croissante de Pékin et préserver ses intérêts stratégiques.
La marine indienne, évolutions capacitaires et nouvelles missions
The Indian Navy: Developing Capability and New Missions
Confronted by Pakistan and, especially, China, the Indian Navy has ambition yet modest assets and suffers from its modernisation programme being suspended because of technical difficulties. New Delhi wishes to be in a position to keep watch over its maritime areas and also to counter the increasing influence of Beijing whilst preserving its strategic interests.
Parce que les conflits frontaliers avec le Pakistan et la Chine constituent des sources majeures d’incertitude et de vulnérabilité, la vision stratégique indienne est avant tout continentale. Dans ce contexte donnant la part belle aux armées de terre et de l’air, la marine est néanmoins parvenue à trouver son rôle. D’abord en tant que force combattante, lors de la guerre indo-pakistanaise de 1971, puis durant les crises de 1999 et de 2001-2002 (également contre le Pakistan), mais aussi à la faveur de la mondialisation de l’économie indienne, le commerce extérieur et les approvisionnements en énergie du pays – en pleine expansion l’un comme l’autre – s’effectuant essentiellement par voie maritime.
Les élites dirigeantes ont ainsi réalisé l’importance des enjeux maritimes en général et du rôle de la marine en particulier. Cette prise de conscience a semblé encore plus marquée depuis que le parti de la droite nationaliste hindou BJP (Bharatya Janata Party - parti du peuple indien) est revenu au pouvoir en mai 2014. De façon symbolique, le Premier ministre Modi a effectué son premier déplacement intérieur à Goa, en juin 2014, pour la mise en service du porte-avions Vikramaditya. En fin observateur de la posture stratégique indienne, Satu Limaye note ainsi : « Il y a un consensus civilo-militaire croissant concernant l’importance des questions maritimes pour le développement de l’Inde, pour sa diplomatie et pour sa sécurité. » (1)
Une vision ambitieuse mais un rythme de modernisation modeste
Le budget de la défense indien dépasse rarement 2 % du produit intérieur brut (il est même tombé à 1,6 % pour 2018-2019, soit 46 milliards de dollars). L’Indian Navy (IN) reçoit généralement 15 % de cette enveloppe budgétaire, quand l’armée de terre en absorbe 55 % et l’armée de l’air 22 %, le reste allant pour la Recherche et le Développement (2). Ces limites financières n’empêchent pas l’IN d’afficher le grand objectif de posséder 200 navires à horizon 2027. Pour l’heure, elle en compte un peu moins de 140, dont 14 sous-marins, 10 destroyers, 14 frégates et un porte-avions (3).
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