Japan’s Foreign relations in Asia
Japan’s Foreign relations in Asia
Cet ouvrage collectif, dirigé par deux professeurs du campus tokyoïte de l’Université Temple, est conçu comme un manuel actualisé et modernisé des relations internationales contemporaines du Japon en Asie. Le parti pris d’un focus asiatique est assumé dès le départ, avec l’objectif de se démarquer par rapport à la littérature, souvent centrée sur la relation nippo-américaine.
Cette dernière, pourtant centrale pour la politique extérieure nippone, est traitée en filigrane. Si le postulat de départ est acceptable, on peut questionner la pertinence du cadre géographique adopté. Alors que Tokyo a développé ces dernières années une stratégie indo-pacifique s’appuyant en particulier sur ses partenariats stratégiques avec l’Inde et l’Australie, la relation entre Tokyo et Camberra n’est pas traitée dans l’ouvrage. À l’opposé, les relations du Japon avec les pays d’Asie du Sud-Est sont particulièrement bien évoquées, ce qui reste assez rare dans les ouvrages sur la diplomatie japonaise. Enfin, l’accent est porté sur la dimension sécuritaire de la politique extérieure japonaise, mise en exergue sous le mandat de Shinzo Abe. Pourtant, la diplomatie économique du Japon (ODA, investissements, accords de libre-échange) est également abordée de manière explicitement stratégique par Tokyo.
Après deux chapitres introductifs (historique et théorique), la première partie de l’ouvrage s’organise autour d’une dizaine d’articles thématiques, développant les problématiques de la normalisation militaire du Japon (réformes de sécurité, alliance nippo-américaine, non-prolifération et désarmement), de sa sécurité maritime (expansion chinoise, différents territoriaux, diplomatie navale), de sa diplomatie multilatérale et de son soft power (réconciliation, aide au développement…). En particulier, deux articles débattent de la nature des derniers développements de la politique de sécurité japonaise, sous Abe. Le Premier ministre Shinzo Abe, en jouant un rôle d’accélérateur des tendances déjà en cours depuis des dizaines d’années vers une normalisation diplomatico-militaire du pays, a-t-il fait sortir le Japon de la « Doctrine Yoshida » ? Cette posture stratégique adoptée dans l’après-guerre devait permettre au Japon de se concentrer sur sa croissance économique en confiant sa défense à l’allié américain. Aujourd’hui, le Japon a bien un rôle proactif pour sa défense et a assoupli un certain nombre de normes antimilitaristes. Toutefois, Tokyo n’est pas encore dans une démarche visant ouvertement à l’indépendance en matière de défense. Selon que l’on regarde le verre à moitié plein ou à moitié vide, les conclusions divergent. Ce débat met en évidence la complexité du positionnement japonais et ses contradictions, relevées tout au long de l’ouvrage : acteur-phare du désarmement, Tokyo reste sous le parapluie nucléaire américain ; sa politique en matière de soft power se heurte à des positions intransigeantes sur les questions territoriales et historiques ; sa politique de promotion des valeurs libérales se heurte aux réalités géopolitiques de ses relations avec des partenaires peu démocratiques, etc.
Rédigé par un groupe d’auteurs qui mêle experts confirmés et nouvelle génération de spécialistes de la politique étrangère et de défense japonaises, cet ouvrage constitue donc une référence actualisée et didactique pour les étudiants et les praticiens s’intéressant à la politique extérieure du Japon en Asie.