Septembre 1988, il y a trente ans. Le porte-avions Clemenceau rentre à Toulon après avoir quitté son port base quatorze mois plus tôt, le 30 juillet 1987, en pleine tourmente de la « guerre des ambassades » entre la France et l’Iran. Prométhée s’achève.

Par sa longueur, son ampleur et sa résonance politique, l’opération Prométhée occupe une place particulière dans la psyché des marins français. Certes, aujourd’hui, plus aucun équipement d’alors n’est en service dans la Marine et bien peu de marins ayant vécu cette mission sont encore d’active. L’époque elle-même, celle de la guerre froide finissante, paraît infiniment distante. Et pourtant, trente ans plus tard, l’aventure de Prométhée est un objet d’étude d’une grande actualité, à la fois en raison de la persistance du caractère central de la zone maritime du Nord de l’océan Indien et du golfe Persique pour l’équilibre mondial, des résultats politiques et militaires obtenus par la Task Force (TF) 623 durant cette opération de grande envergure et enfin de la place qu’y a occupé le porte-avions.

Sans prétendre retracer avec exhaustivité cette opération qui impliqua une grande partie de la flotte française dans des missions variées, nous nous attacherons ici à remettre en perspective Prométhée dans la généalogie des opérations navales françaises d’hier et d’aujourd’hui. Par ailleurs, si Prométhée fut une opération aux composantes multiples, sa clé de voûte fut le groupe aéronaval (GAN) constitué autour du Clemenceau, dont l’action irrigue toute la TF 623 du début à la fin de sa mission : c’est donc sur le GAN que nous axerons notre propos, sans risque de donner une vision trop réductrice de cette opération. Ce faisant, nous verrons comment Prométhée, forme de point culminant dans les opérations navales de l’Ancien Monde, est une source utile d’enseignements pour notre temps.