Le fait aérien a transformé la conduite des opérations durant la Grande Guerre. Le commandement français a su conjuguer progrès techniques et emploi tactique de l’aviation avec un grand pragmatisme et une efficacité reconnue. La doctrine a été élaborée au fur et à mesure avec l’appui du Haut commandement qui a vu le potentiel de cette nouvelle arme.
Le fait aérien dans la Grande Guerre : révolution dans les affaires militaires
Air Power in the Great War: a Revolution in Military Affairs
The arrival of air power transformed the conduct of operations during the Great War. With great pragmatism, the French command combined technical progress with effective tactical use of aviation. Appropriate doctrine was established over time with the support of the high command, which had recognised the potential of this new weapon system.
Onze ans séparent le vol des frères Wright des premières heures de la Grande Guerre où ce nouvel engin qu’est le fragile aéroplane en bois et toile soumis aux caprices de la nature – le vent, le brouillard, la pluie – est pourtant présent en première ligne dans toutes les armées des belligérants. L’irruption de l’avion dans la guerre qu’accompagnent la technologie, la science et l’industrie appliquées à la 3e dimension va révolutionner la pensée militaire tant sur les plans stratégique, tactique, qu’opérationnel. Tout au long de ces quatre années de guerre, les responsables militaires français vont s’attacher à définir une organisation et un emploi opérationnel de l’aviation militaire qu’ils vont codifier sous la pression des événements par le biais de notes et instructions diverses. Une douzaine de textes fondateurs constituent ce corpus doctrinal : parmi ceux-ci, trois portent la signature du maréchal Joffre et cinq celle du maréchal Pétain. C’est dire l’intérêt porté par les officiers généraux à la 3e dimension, loin du cliché traditionnel s’appuyant sur la célèbre phrase attribuée au général Foch avant guerre « l’aviation c’est du sport ».
Il faut dire qu’entre septembre 1909, où en France le ministère de la Guerre achète ses 5 premiers aéroplanes et la mobilisation, à l’été 1914, où l’armée dispose de 134 appareils, les responsables de l’aéronautique ont eu la lourde charge d’organiser et de structurer l’aviation naissante par la loi de mars 1912 et de rédiger un premier texte sur « l’emploi de l’aéronautique en temps de guerre » la même année. Toutefois, même si les aéroplanes ont participé depuis 1910 aux grandes manœuvres et qu’une escadrille opère au Maroc dès 1912 dans le cadre d’opérations de police coloniale, jamais l’aéronautique française n’a encore connu l’épreuve du feu face à des appareils ennemis.
Les quatre années de guerre vont contraindre les responsables militaires à adapter ou renouveler sans cesse leurs analyses et leurs discours face aux circonstances afin de les traduire au mieux et le plus rapidement possible sur le plan opérationnel. Dans le même temps, les progrès technologiques et industriels en matière d’aviation ouvrent de nouveaux horizons élargissant par là même le champ de la doctrine d’emploi. L’enjeu du progrès technologique s’avère déterminant entre des belligérants qui se livrent à une course effrénée où les innovations de l’un suscitent l’émulation de l’autre et bouleversent donc les discours doctrinaux en cours.
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