L’Académie française a vu d’éminents militaires sur ses fauteuils. Mais depuis la disparition du Maréchal Juin (1967) et hormis Michel Serres, ancien bordache (École navale), l’institution militaire n’est plus représentée, ce qui est dommage, alors même que désormais des officiers prennent la plume pour porter une pensée stratégique française.
L’Académie française et les militaires
The Académie française and Military Personnel
The Académie française has seen a number of eminent military personnel on its benches, yet since the death of Marshal Juin, and with the exception of Michel Serres, a former pupil at the École navale, military experience is no longer represented. This seems a pity, particularly since officers are now putting pen to paper about French strategic thought.
À l’occasion de la visite d’une promotion de saint-cyriens à l’Académie française, Mme Hélène Carrère d’Encausse, secrétaire perpétuel (1) de la prestigieuse institution créée par Richelieu en 1635, a déploré l’absence de militaires dans ce haut lieu de la culture. Pourtant, jusqu’à une époque récente, l’armée française a souvent été représentée sous la coupole par des personnalités qui ont su mêler une carrière sous les armes et une œuvre littéraire.
Des militaires sous la coupole
La Marine nationale éprouve toujours une grande fierté d’avoir eu dans ses rangs trois académiciens. Le premier, Pierre Loti (1850-1923), officier de Marine, entré à l’École navale en 1867, s’est nourri de ses nombreux voyages pour écrire des romans. Le Sénégal lui a inspiré Le roman d’un spahi (1881), le Japon Madame Chrysanthème (1887), la Turquie Les désenchantées (1906), un récit saisissant sur les harems turcs. Mais son plus grand chef-d’œuvre reste Pêcheur d’Islande (1886) qui lui vaudra son admission à l’Académie française en 1891 au fauteuil numéro 13 (celui qu’occupera Simone Veil en 2008). Le mérite du militaire écrivain est d’autant plus fort qu’il battra de quelques voix au deuxième tour de l’élection le célèbre romancier Émile Zola. Pierre Loti a terminé son parcours militaire comme capitaine de vaisseau après avoir commandé le bâtiment Vautour.
Claude Farrère (1876-1957) est le deuxième officier de Marine, entré à l’École navale en 1894, qui a siégé sous la coupole. Élu en 1935 au fauteuil 28, il bat de justesse Paul Claudel à l’issu d’un scrutin très serré. À l’instar de Pierre Loti, ses multiples périples ont alimenté son imagination pour écrire une abondante littérature : Les civilisés, prix Goncourt (1905), La bataille (1909), Dix-sept histoires de marins (1914), Quinze histoires de soldats (1916), La nuit en mer (1938)… On doit aussi à Claude Farrère, qui termina sa carrière militaire avec le grade de capitaine de corvette, un document très fouillé sur une Histoire de la marine française (1934).
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