La Marine doit poursuivre son évolution technologique et doctrinale tout en s’appuyant sur sa robustesse. L’innovation permet d’agir plus vite en étant davantage efficace et performante permettant à la Marine 4.0 de conserver son leadership.
La Marine 4.0 : une révolution industrielle
The Marine 4.0: an Industrial Revolution
The French Navy (La Marine) needs to continue its technological and doctrinal development, whilst drawing upon its strengths. Innovation means the capability to act more rapidly, with greater effect and increased performance. In this way, the Marine 4.0 will remain a top rank navy.
« À hauteur d’hommes », le qualificatif est utilisé avec peu de parcimonie au sujet de la Loi de programmation militaire 2019, façon de rappeler, à l’instar de nombreux autres domaines, l’importance de la place de l’Homme dans les évolutions actuelles de la société et des technologies. Début du XXe siècle, l’homme possède une nouvelle technologie, le radar, mais ne voit pas encore d’utilité ou d’applications tant civiles que militaires. Il lui faudra des années pour parvenir à la miniaturisation et l’utilisation optimale de ce moyen, mais aussi pour comprendre le potentiel de cet outil en tant que système de combat pour les opérations aéromaritimes. Entre ces deux époques, une constante : l’être humain a besoin de temps pour appréhender et mettre en œuvre efficacement les nouvelles technologies. Ce temps aujourd’hui, nous ne l’avons plus. Ainsi, profitons de l’expérience passée du radar pour mettre en place une marine innovante, qui sait utiliser les nouvelles technologies à bon escient, avec pertinence : la marine 4.0.
Du télémobiloscope au radar moderne
Le premier brevet apparenté au radar, celui du télémobiloscope, a été déposé par Christian Hülsmeyer en 1904. Il s’agit d’un simple émetteur-récepteur permettant de détecter la présence d’une coque métallique de bateau à moins de 2 nautiques. Le monde est alors plus préoccupé par le développement de la radiotélégraphie, plus prometteuse, et ce malgré le naufrage du Titanic en 1912. Le principe de détecter des objets à distance n’intéresse pas, ou du moins pas « au-dessus de la surface ». L’intérêt pour le tir à longue portée est naissant, issu des enseignements de la bataille de Tsushima et des réformes de l’amiral Fischer. Il se concentre sur la détection optique, le calcul analogique et le pointage électromécanique. Il en va autrement sous l’eau : les travaux de détection se sont focalisés au cours de la Première Guerre mondiale sur l’acoustique afin de répondre à la menace sous-marine grandissante, plus dangereuse que la menace aérienne encore limitée. En surface, l’approche doctrinale de la détection demeurait centrée sur les forces d’éclairage avec un recours accru aux moyens aériens (dirigeables). La détection électromagnétique n’apparaissait pas de nature à apporter un avantage décisif par rapport aux moyens disponibles.
Il faudra attendre la Seconde Guerre mondiale et l’apparition de raids aériens tant allemands que japonais pour comprendre la nécessité du radar. En décembre 1941, Pearl Harbor était déjà équipé d’un des nouveaux radars SCR-270 américain, destiné à détecter des bombardiers jusqu’à 120 nautiques. Le manque de personnel radariste qualifié sera, en partie, responsable de l’ampleur de la catastrophe pour l’armée américaine : l’interprétation des échos apparus a nécessité trop de temps, empêchant toute anticipation de l’attaque. À l’inverse, les Britanniques avaient prévu le risque aérien dès 1939 en installant des systèmes de détection le long de leurs côtes, le « Chain Home ». La précision est certes médiocre, de l’ordre de 12 degrés, mais suffisante pour donner l’alerte : l’intégration doctrinale dans le système de défense aérienne et l’exploitation directe des détections par l’état-major pour répartir les vagues de chasseurs britanniques, permirent de résister à l’aviation allemande. Ainsi, les Américains du Pacifique ont manqué d’agilité d’esprit et d’adaptation face au nouvel outil qu’était le radar mais également de doctrine : c’est par la doctrine qu’on forge l’utilisation d’un nouveau système et qu’on acquiert une vision cohérente de l’emploi d’une arme.
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