Preamble–Defence and Security: Decision Time for Europe
Préambule - Défense et sécurité, l’Europe à l’heure des choix
À intervalles réguliers, dès qu’une crise internationale ou des désaccords régionaux se manifestent, se pose la question de la sécurité européenne. Certes, l’Alliance atlantique avait été conçue à cette fin, mais dans le contexte géopolitique du bilatéralisme et de la guerre froide. Depuis une trentaine d’années, les facteurs successifs qui ont perturbé la sécurité mondiale n’ont suffi à remettre en cause ni le concept, ni l’organisation de la sécurité collective. Ceux-ci étaient fondés sur la suprématie et la garantie offertes par les États-Unis. Mais ces dernières années, avec le pivot vers le Pacifique du président Obama, puis avec le désintérêt, voire l’hostilité affichée du président Trump à l’égard des enjeux de sécurité européens, les Européens sont en droit – et ont le devoir – de se poser la question de leur sécurité et de leur défense.
Cette question se pose en termes nouveaux par rapport à l’époque de la guerre froide où la posture de sécurité était essentiellement militaire, à l’abri d’un parapluie nucléaire qui rendait la dissuasion effective et opérante. Si la menace militaire soviétique s’est éteinte et ne semble pas devoir resurgir sous des formes semblables, par contre, de nouveaux espaces de conflictualité sont nés, soit d’émergences nationalistes et impériales agressives, soit de ruptures techniques dans des champs conventionnels, soit enfin d’incursions dans d’autres dimensions comme le spatial et le cyber. Il apparaît donc que, politiquement comme sur le plan stratégique, le système de sécurité existant ne suffit plus à couvrir l’ensemble du spectre.
La complexité même du champ stratégique actuel oblige à des réponses multiples et originales qui doivent se traduire dans des dispositifs cohérents mais diversifiés, selon la nature et la géographie des problèmes. La polyvalence affirmée de l’Otan et ses capacités de réactions adaptées ont prouvé leur efficacité mais aussi leurs limites et leurs insuffisances.
L’Union européenne, construction politique originale mais incomplète, notamment sur le plan stratégique, a besoin de renforcer, voire de constituer, toute la partie du système de sécurité qui assurerait la souveraineté des États-membres de l’Union ; la sécurité collective spécifique de l’Europe ; la défense d’intérêts vitaux européens existants ou à mettre en évidence.
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Depuis l’échec de la CED en 1954 (du fait de la France) et après maintes tentatives de faire naître quelque chose qui ressemble à un système européen de défense, le temps semble venu de reprendre sérieusement le dossier, désormais sous l’empire de la nécessité, compte tenu du « lâchage américain » et de la montée des tensions impérialistes dans le monde.
En préambule, il paraît utile d’évoquer les temps forts de cette histoire récente afin d’en comprendre les péripéties et d’en dénoncer les obstacles. Outre les problèmes « d’armée européenne » et de capacités conjointes éventuelles, plusieurs sujets doivent être déminés au préalable car ils sont susceptibles de bloquer toute avancée majeure vers un système commun : le nucléaire français, le budget européen, l’industrie d’armement, le renseignement. Ils représentent un socle sans lequel il serait illusoire de vouloir faire avancer le dossier. ♦