Le grand livre de l’Afrique
Le grand livre de l’Afrique
« J’en ai lu des livres sur l’Afrique, depuis le temps que je l’aime, et que je m’acharne à la comprendre. Peu d’entre eux m’ont autant éclairé. » L’élogieuse préface rédigée par l’académicien Erik Orsenna, rend bien compte de l’ambition très pédagogique et érudite de l’ouvrage de Nicolas Normand. Il faut dire que l’auteur est un ancien diplomate qui nous fait partager avec générosité sa connaissance de l’Afrique et son expérience comme Ambassadeur de France en Afrique du Sud, au Mali, au Congo, au Sénégal et en Gambie…
L’auteur qui est Normalien, ingénieur agronome et énarque, porte un regard pluriel sur un continent qu’il connaît très bien et en dresse un panorama politique, économique et culturel exhaustif. Jusqu’alors il n’existait pas pour l’Afrique subsaharienne, de synthèse explicative et claire des transformations sécuritaires, politiques, culturelles et économiques s’appuyant sur les sciences sociales et l’ethnopsychiatrie. Ce livre constitue donc une réelle plus-value scientifique que l’on découvre avec curiosité et intérêt. Le style sort de l’épure strictement scientifique, pour emprunter un ton vivant, aux prises avec les trois thématiques d’actualité contemporaine sur l’Afrique : « mutation », « sécurité et géopolitique », « assistance et émergence ». Au sein de ces trois grandes parties, le lecteur est invité à réfléchir à des questions de fond très directes : « La pauvreté est-elle une fatalité ? », « Sortir de la guerre et du terrorisme, est-ce encore possible ? », « Les pays riches doivent-ils encore aider l’Afrique ? »…
L’originalité de cet ouvrage vient notamment du fait que Nicolas Normand décrypte les sociétés africaines au-delà de leurs apparences. Pour cela, il a notamment recours à des anthropologues qui lui ont permis de dépasser l’analyse diplomatique et économique traditionnelle. En marge des approches politiquement correctes, l’ancien ambassadeur n’hésite pas à remettre en cause certains principes de l’Aide au développement, arguant même qu’elle a contribué à fragiliser des États déjà très vulnérables, car elle s’adressait directement aux populations, provoquant ainsi une déresponsabilisation des pouvoirs publics, au profit des bailleurs de fonds et des ONG. Selon Nicolas Normand, « l’Aide française n’est pas pilotée politiquement ». Il faudrait aider bien davantage la justice, l’armée, la gendarmerie, la police, les services fiscaux et se focaliser sur les non-émergents.
Agréable à lire, précis dans ses exemples, cet ouvrage nous offre une grille de compréhension qui bouscule certains poncifs sur la démocratie et la gouvernance africaines, notamment grâce à des analyses peu fréquentes de l’économie criminelle, des groupes armés et de la notion d’ethnicité. Nicolas Normand aime le continent africain, et c’est finalement avec un optimisme lucide et mesuré qu’il nous invite à en appréhender le présent et l’avenir. Agrémenté d’une douzaine de cartes et disponible en format numérique, ce livre fournit les clés indispensables à tous ceux qui ont à traiter de ce vaste continent. ♦