L’amiral Guy Labouérie, décédé en 2016, a été un grand penseur de la stratégie et a profondément influencé plusieurs générations de marins. Écrivain rigoureux, fortement influé par la théologie chrétienne, il a construit une œuvre souvent complexe mais posant des questions essentielles sur la violence.
L’amiral Guy Labouérie : de la métaphysique à la stratégie
Admiral Guy Labouérie: from Metaphysics to Strategy
Admiral Guy Labouérie, who died in 2016, was a great strategic thinker and had considerable influence on several generations of seafarers. He was heavily influenced by Christian theology and his rigorous writing often led to complex works that posed vital questions on the use of force.
Le vice-amiral d’escadre Guy Labouérie nous a quittés le 18 mars 2016. Nous sommes nombreux à avoir travaillé sous ses ordres ou à avoir suivi son enseignement dans la Marine, mais également dans les multiples lieux et instances où il est intervenu. L’amiral était une personnalité hors norme, réellement charismatique alors que le mot est bien galvaudé, il ne pouvait laisser indifférent, car il avait aussi ses détracteurs, sceptiques ou lassés par son ton parfois prophétique, voire imprécateur. Il n’hésitait pas à dire des vérités qui pouvaient être désagréables.
L’homme
Fils d’un général de corps d’armée, de l’arme du génie, polytechnicien, blessé pendant la campagne d’Italie et resté handicapé, Guy Labouérie entre à l’École navale en 1953. Sa longue carrière militaire le conduit dans l’océan Indien, plusieurs fois loin de sa famille, périodes qu’il met à profit pour écrire. Sa carrière s’achève au commandement de l’École supérieure de guerre navale (ESGN) en 1992 au cours duquel il marque profondément les stagiaires par les thématiques qu’il livre à leurs réflexions, et par la hauteur de ses propres idées, dont il n’hésite jamais à leur faire part. Il continue à écrire et à publier tout en enseignant jusque vers 2010. Il échangera ensuite par Internet avec son réseau d’amis et de correspondants assurant une fonction de veilleur et de lanceur d’alertes.
Les militaires ne s’expriment pas suffisamment, lui le faisait. Sa pensée est réellement originale, souvent en décalage avec la pensée dominante. Comme pour la plupart des penseurs militaires elle n’a pas été reconnue par la hiérarchie toujours inquiète de voir s’exercer librement une réflexion qu’elle ne pouvait contrôler. Mais sa propre pensée paraissait également trop métaphysique dans le monde de la politique et de l’action. Il demeure qu’il est un des rares officiers de Marine à avoir publié depuis la fin de la guerre, en service actif, ses réflexions sur l’action, sa finalité, sa méthodologie, la stratégie, voire la géopolitique. Mais nous le verrons ultérieurement, il a aussi écrit des poèmes et un long roman.
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