La Méditerranée orientale est riche d’hydrocarbures. Cet avantage économique se transforme peu à peu en facteur de risques en accroissant la discorde et la rivalité entre les pays riverains. Chacun s’efforce d’accroître ses zones d’exploration avec une militarisation croissante des espaces maritimes, en particulier de la part de la Turquie.
Méditerranée orientale : les hydrocarbures de la discorde
The Eastern Mediterranean: the Hydrocarbons of Discord
The eastern Mediterranean is rich in hydrocarbon deposits. This economic advantage is gradually becoming a factor of risk, increasing the discord and rivalry between nations on the littoral, each of which—Turkey in particular—is attempting to broaden its areas of exploration in parallel with increasing militarisation of sea areas.
Depuis deux ans et malgré la volonté croissante de l’Union européenne de limiter l’importance de la Russie dans les approvisionnements du continent, celle-ci bat des records d’exportation de gaz vers l’Europe. Gazprom – et maintenant Novatek dans le gaz naturel liquéfié (GNL) – sont des acteurs de plus en plus conséquents de la sécurité énergétique européenne. Face à cette situation préoccupante, plusieurs stratégies avaient été envisagées. D’une part, l’appui sur les ressources gazières européennes (Norvège, Pays-Bas, Royaume-Uni) et d’autre part, à partir de 2008, la promotion d’une nouvelle voie vers l’Asie centrale et le Moyen-Orient. La situation actuelle n’apparaît pas comme idéale. En effet, les ressources de la zone européenne déclinent rapidement après des décennies d’exploitation, nécessitant d’en trouver de nouvelles à un horizon relativement court. La stratégie de l’Union d’un « Corridor sud-européen » a, quant à elle, buté sur les différentes péripéties internationales, des sanctions contre l’Iran à la mainmise chinoise sur le Turkménistan. L’Europe doit donc trouver de nouvelles sources d’approvisionnement hors de Russie. À ce titre, les découvertes de nouveaux champs gaziers en Méditerranée orientale à la fin de la décennie 2000 ouvrent de nouvelles perspectives. Les découvertes au sein de l’UE (Chypre) et dans les pays proches (Israël, Égypte) sont une opportunité pour la sécurité énergétique du continent européen. Toutefois, des questions demeurent ouvertes, à la fois dans le domaine politique sur la possession des ressources – et les tensions qu’elles ouvrent – et dans le domaine économique sur la définition d’un système d’exportation, par gazoducs ou méthaniers. Sans qu’elle ne puisse remplacer la Russie, eu égard aux volumes et engagements auprès de Moscou, la Méditerranée orientale est une région de grandes opportunités, autant que de potentielles tensions.
La Méditerranée orientale et ses nouvelles richesses
Historiquement, la Méditerranée orientale, malgré sa proximité avec des territoires riches en pétrole et en gaz, fut une région essentiellement consommatrice. À l’exception de quelques ressources terrestres, notamment en Syrie et en Égypte, la région comptait sur des approvisionnements extérieurs en provenance du golfe Arabo-Persique. La Méditerranée orientale fonctionnait comme un système à part – avec des infrastructures comme le Arab Gas Pipeline d’Égypte jusqu’en Syrie – ou comme le point terminal de réseaux multinationaux (Grèce, Turquie). Le premier changement important a lieu en 2000 avec la découverte du champ de Mari-B en Israël qui ouvre des perspectives de consommation nationale, permettant à Tel Aviv d’augmenter notablement son niveau de sécurité énergétique. Cette découverte est confirmée au milieu des années 2000 avec le champ de Tamar, toujours en Israël, lui aussi orienté sur la consommation intérieure pour s’affranchir du fournisseur historique égyptien.
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