La Libye post-Kadhafi est à nouveau en crise avec l’offensive du maréchal Haftar vers Tripoli. Le pays est divisé entre des acteurs préférant des solutions militaires à des discussions politiques. De fait, l’impasse est totale tant que les protagonistes s’affronteront pour défendre leurs propres intérêts, au détriment d’une négociation globale.
Quelles perspectives de sortie de crise pour la Libye ?
Perspectives for Crisis Resolution in Libya
Libya post-Gaddafi is once again in crisis with Field Marshal Haftar’s offensive on Tripoli. The country is divided among players preferring military solutions to political discussions. Matters are at a total impasse, since the protagonists continue to confront each other in defence of their own interests to the detriment of broader negotiations.
La Libye a été fracturée depuis 2011 en plusieurs morceaux. Une rivalité s’est instaurée entre les différentes milices dans les villes, affaiblissant de facto le pouvoir politique. Puis, trois autres fractures sont apparues : entre les milices et l’armée, entre le politique et l’armée ainsi qu’entre militaires. Ces fractures, sur fond de concurrence concernant les richesses pétrolières, ont eu raison jusqu’à présent de toute réconciliation entre les acteurs, et de la mise en place d’élections. Un des acteurs majeurs de la crise libyenne, le maréchal Khalifa Belqassim Haftar a en effet décidé de marcher sur Tripoli afin de la « libérer de groupes terroristes », interrompant du coup toute sortie politique de la crise au profit d’une solution militaire.
Si le Premier ministre libyen, Mahmoud Jibril, avait prévu dès la chute de Tripoli, en août 2011, de démanteler les brigades révolutionnaires qui ont combattu Mouammar Kadhafi durant la Révolution, les faits n’ont guère permis cette réalisation. En effet, dès la chute de la capitale, les brigades révolutionnaires ont instauré de façon officieuse, sans l’accord des politiques et sans décret, des Conseils militaires dans les villes où ont eu lieu les combats. Leur rôle ? Ils sont censés chapeauter les brigades révolutionnaires afin d’empêcher les anciens du régime kadhafiste de revenir dans ces villes, de coordonner des opérations à l’extérieur de celles-ci, mais aussi d’éviter que les brigades n’entrent mutuellement en conflit. Enfin, leur création doit répondre au rétablissement de l’ordre dans les rues, en l’absence de toute police, et suppléer tout autant, à l’absence d’une police judiciaire.
C’est Tripoli, la capitale, qui a été la première à initier la mise en place d’un Conseil militaire. Ce premier Conseil est alors dirigé par l’ancien djihadiste Abdelhakim Belhadj (1). Son but est de remplacer les organes de sécurité disparus mais aussi de mettre l’ensemble des Brigades révolutionnaires sous ses ordres. Ce qui amènera une contestation virulente de la part des autres brigades révolutionnaires qui se sont installées dans la capitale, comme cela fut le cas des brigades de Misrata et de Zentan. Dès lors, Tripoli aux mains des brigades devenues milices deviendra l’objet de combats territoriaux avec en toile de fond la paternité de la chute du régime. Par ailleurs, les services de police seront quasiment livrés à eux-mêmes dans la capitale, dépendant du Haut Conseil de sécurité (HCS) contesté par les milices, les tripolitains tout autant que les politiques.
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