La logistique opérationnelle, au cœur des opérations, doit être mieux prise en compte dans la formation des officiers pendant leur cursus, de l’application à l’EMS3, avec une mise en situation durant les scolarités. Cette approche renforcerait la cohérence de l’engagement et une conduite optimisée du déploiement de nos forces.
La logistique opérationnelle : espace lacunaire dans la formation des chefs militaires ?
Operational Logistics: Missing from Military Chiefs’ Training?
Operational logistics are at the heart of operations yet need to have a more important place in the training of officers throughout their careers, from application courses to higher command training, with situational exercises at all levels. Such an approach would strengthen the coherence of a military engagement and lead to better conduct and deployment of our forces.
Sun Tzu place très tôt la problématique de la logistique au cœur des préoccupations du chef de guerre. Face aux coûts importants générés par un conflit, notamment l’entretien des matériels et les munitions qui selon lui représentent le principal poste de dépense d’une armée en campagne, le stratège chinois propose des solutions palliatives. Celles-ci consistent par exemple à se ravitailler chez l’adversaire pour économiser sa propre ressource, même si des risques de révolte de la population locale existent. Clausewitz, autre théoricien célèbre de la guerre, ne se préoccupe pas de ces aspects économiques, pensant que la logistique doit suivre, alors qu’Antoine Henri Jomini, dans son Précis de l’art de la guerre publié en 1838, voit la stratégie, la tactique et la logistique comme les trois volets de l’art de la guerre.
De nos jours, les avis sont unanimes : la logistique est une fonction essentielle et reconnue comme telle dans tous les documents de doctrine. Or, encore récemment, elle faisait l’objet dans l’Armée de terre d’une simple séance de travaux dirigés de quatre heures à l’École d’état-major et au feu Cours supérieur interarmes. Elle pouvait même ne se résumer qu’à deux lettres, p et m, dans les sujets du concours de l’École de Guerre… Ainsi, si la logistique est effectivement un pilier de l’art de la guerre, son apprentissage par tous les acteurs d’une opération semble bien fragile.
C’est pourquoi il est pleinement légitime de s’interroger d’une part, sur la place que l’étude de la logistique doit prendre dans l’apprentissage de la manœuvre interarmes et interarmées, car sans elle la manœuvre n’existe pas, et d’autre part, sur la façon de l’intégrer pleinement dans l’ensemble du cursus de formation des futurs chefs militaires afin qu’elle soit, dès la conception, pensée, réfléchie et intégrée. Le problème n’est en aucun cas un manque d’efficacité : n’en déplaise à ses détracteurs, les opérations récentes le prouvent : nos logisticiens sont des magiciens. La difficulté réside davantage dans la méconnaissance, voire le désintérêt relatif qu’elle suscite parfois chez le potentiel chef interarmes.
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