Le Pakistan demeure instable à cause de ses contradictions internes. Les forces armées – État dans l’État – constituent l’épine dorsale du pays où le sentiment national est exacerbé notamment contre l’Inde, la grande puissance rivale, poussant le « pays des purs » à renforcer sa dépendance à l’égard de la Chine.
Un Pakistan instable mais avec une armée solide (2/2)
Pakistan is Unstable, yet Possesses a Reliable Army(2/2)
Pakistan remains unstable because of its domestic contradictions. The armed forces act as a state within the state and form the backbone of the country in which national feeling is growing—against India in particular, seen as the great rival power—and moving ‘the land of the pure’ to increase its dependence on China.
La mésentente entre les autorités civiles et militaires dans les plus hautes instances de l’État a été le plus souvent flagrante. Le National Security Council ne remplit pas son rôle car il ne se réunit pas souvent. Le pouvoir judiciaire en a profité pour accroître son autorité, outrepassant même quelquefois ses prérogatives. Dans les années passées, il a empiété dans le domaine du pouvoir exécutif. La Cour suprême a ainsi déclenché une procédure de destitution du Premier ministre démocratiquement élu, Nawaz Sharif, accusé de corruption, d’absence de déclarations d’activités rémunérées à l’étranger et d’acquisitions illégales de biens immobiliers. Celui-ci a été démis de ses fonctions à l’été 2017 et interdit à vie d’exercer des fonctions publiques. D’autres personnalités ministérielles ont aussi été sanctionnées. Par ailleurs, la Cour suprême a dénoncé les attentats dont est victime la communauté hazara de Quetta. En examinant les disparitions de personnes, elle a même pris le risque de mécontenter l’armée, plus précisément l’armée de terre, soupçonnée à demi-mot de procéder à des arrestations arbitraires de militants suspects et de terroristes présumés. Elle a pris ainsi fait et cause pour le Pashtun Tahaffuz Movement.
Mais l’armée a les moyens de réagir. Le principal service de renseignement, l’Inter-Services Intelligence (ISI) demeure sous sa coupe et peut interférer dans le déroulement des campagnes électorales.
Depuis l’indépendance, l’armée, plus précisément l’armée de terre, a exercé le pouvoir directement plusieurs fois et pour de nombreuses années. Ce n’est plus le cas actuellement mais son rôle est toujours sous-jacent. Le nouveau Premier ministre Imran Khan, au pouvoir depuis les élections de 2018, est en effet sous la coupe des militaires. L’armée de terre administre depuis plusieurs années une justice parallèle pour les terroristes dont bon nombre furent condamnés à mort par les tribunaux militaires. Elle définit dans une large mesure la politique étrangère, notamment à l’égard des pays voisins et des grandes puissances. Les forces armées gèrent des pans entiers de l’économie, surtout dans les secteurs bancaire, de l’immobilier et du transport. Le chef d’état-major de l’armée de terre a été inclus dans le National Development Council créé en juin 2019. Ce faisant, les forces armées s’attirent des critiques de la part de plusieurs partis politiques et des citoyens. Le Parlement a perdu sa suprématie, son rôle étant réduit par les empiétements du pouvoir judiciaire et de l’armée. Les forces armées sont en réalité la seule institution efficace du pays. Du fait du budget important dont elles disposent et des avantages qu’elles accordent à leurs officiers, l’élite de la société n’hésite pas à embrasser la carrière militaire. Les cadres sont, en règle générale, d’une très grande valeur. Les officiers pakistanais qui ont suivi des formations à l’École de Guerre en France et à l’Institut des hautes études de défense nationale en sont le témoignage.
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