Le dérèglement climatique agit désormais et fragilise la sécurité et la paix dans de nombreuses régions du globe. D’où le besoin d’une réflexion stratégique pluridisciplinaire que l’IHEDN conduit avec ses auditeurs, apportant des éclairages et des expertises croisés. Le défi du XXIe siècle est devant nous.
L’impact du dérèglement climatique sur les enjeux de défense et de sécurité
The Impact of Climate Change on Defence and Security Challenges
Climate change is upon us and is acting in several regions of the globe to destabilise peace and security. Hence the need for the multi-disciplinary strategic thinking conducted with students at the Institute for higher national defence studies (Institut des hautes études de défense nationale—IHEDN), which brings together experts from many backgrounds and offers different perspectives. A great challenge for the twenty-first century stands before us.
L’impact du dérèglement climatique sur l’environnement, le développement et la santé publique est désormais largement connu et médiatisé. Les conséquences possibles sur la sécurité et la paix, indirectement liées aux bouleversements induits par ces phénomènes globaux, d’une ampleur sans précédent dans l’histoire de l’humanité, sont moins souvent évoquées. Et pourtant, le réchauffement climatique porte en germe des désordres sécuritaires auxquels il convient de se préparer. Nous savons, en effet, que la raréfaction des ressources vitales telles que la nourriture et l’eau, corrélée à la montée en puissance des épisodes de sécheresse, accentuent le risque de conflits pour leur maîtrise. La multiplication prévisible d’événements climatiques extrêmes (stress hydrique, inondations, voire submersions de certains territoires) augmentera cet autre facteur d’insécurité que constituent les déplacements de populations. Nous avons appris de l’histoire, depuis que l’accès à l’énergie est au fondement du développement économique, que l’inégale répartition des gisements disponibles engendre des rivalités susceptibles de menacer la sécurité internationale. Décarboner l’économie, en ce sens, c’est aussi réduire les risques de conflits induits par la quête concurrente de contrôle des énergies fossiles.
Agir pour la planète, autrement dit, c’est agir pour la paix. En atteste d’ailleurs très explicitement la réception par les scientifiques du groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) du prix Nobel dédié. Dans la configuration actuelle, marquée par l’imbrication étroite des défis à surmonter, comment s’adapter aux effets du dérèglement climatique, en tant qu’accélérateur de conflits menaçant la sécurité internationale ? Quels enseignements tirer pour nos politiques de défense des bouleversements redoutés et attendus ? Bref, comment se préparer et anticiper ? Question qui structure naturellement la définition et l’engagement des forces armées. Question aussi qui oblige à se projeter dans le long terme, à agir en stratège tout en pensant en acteur de la défense et de la sécurité.
Le renouveau de la réflexion stratégique est donc rendu nécessaire par la complexité des défis enchâssés qui appellent une vision globale et prospective des problèmes. Ainsi, l’IHEDN qui a l’habitude de faire travailler ensemble des auditeurs venus de tous horizons, civils et militaires, hauts responsables de l’État et dirigeants d’entreprises, praticiens et chercheurs, acteurs du monde associatif, journalistes et responsables politiques, a choisi cette année de proposer comme sujet d’étude à la session nationale politique de défense : « L’impact du changement climatique sur les enjeux de sécurité et de défense ». Il nous est, en effet, apparu nécessaire et comme allant de soi, de mettre à contribution un savoir-faire éprouvé – consistant à réunir et à faire dialoguer entre eux des mondes qui habituellement se parlent peu – pour susciter les interactions nécessaires au débat stratégique dont notre pays a besoin pour se préparer de manière optimale à affronter des défis inédits.
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