Certains conflits ne se traduisent pas nécessairement par des affrontements armés soutenus par des confrontations d’intérêts économiques divergents. Lorsque le coût devient excessif, certaines parties considèrent que le retrait offre plus de bénéfices au final. Les Guerres de la morue entre l’Islande et le Royaume-Uni en sont un exemple.
Le pouvoir « destructeur » des agents économiques
The Destructive Power of Economic Agents
Certain conflicts do not necessarily take the form of armed clashes supported by confrontations of diverging economic interests. When the cost becomes excessive, some parties consider that retreat offers the greater benefit in the long run. The Cod Wars between Iceland and the United Kingdom are an example of this.
Les objets d’étude de la science économique peuvent se trouver au carrefour de multiples disciplines. Cela s’observe particulièrement pour l’économie des conflits qui réalise un pont entre les sciences politiques et le droit. Alors que l’économie standard suppose que les agents ne disposent que de deux moyens pour se procurer un bien ou un service : la production et l’échange, l’économie des conflits considère aussi le « pouvoir destructeur » détenu par des agents qui peuvent toujours faire le choix de s’approprier par la violence des ressources. L’étude du conflit dans la pensée économique est complexe et le champ d’application du concept est large. Il englobe à la fois la cause d’un différend et le processus d’opposition mis en place par les protagonistes pour atteindre leurs objectifs et résoudre ce différend. Cet article se concentre sur une approche singulière des conflits, celle de Vahabi (2012) particulièrement pertinente pour appréhender les conflits d’appropriations.
Vahabi (2012) estime que les modes classiques de coordination entre agents, à savoir le marché, la bureaucratie et l’éthique, ne reflètent pas l’ensemble des comportements humains. Il postule pour un quatrième mode de coordination et d’allocation des ressources reposant sur la coordination destructive, où l’affrontement physique n’est pas nécessaire à l’occurrence d’un conflit. Vahabi (2012) propose de considérer trois « moments » du processus conflictuel : les intérêts conflictuels, le comportement conflictuel et l’action conflictuelle. La notion d’intérêt conflictuel renvoie à l’idée selon laquelle le conflit trouve sa source première dans l’existence d’entités ayant des intérêts divergents (conflits d’intérêts, de répartitions et d’usages). Par la suite, les deux entités peuvent faire le choix de recourir à un certain nombre de comportements conflictuels sans forcément entrer dans la spirale d’un conflit armé, c’est-à-dire une action conflictuelle entraînant des pertes humaines et la destruction de richesse. Ceux-ci peuvent prendre des formes variées allant de méthodes coercitives non institutionnelles (menace, intimidation ou chantage), à des méthodes institutionnelles telles que les sanctions.
Cet article vise à présenter et illustrer la contribution de l’économie des conflits à l’analyse de l’appropriation des rentes. La première partie vise à présenter la réflexion de Vahabi (2012) sur le « pouvoir destructeur » ainsi que ses conséquences sur l’appropriation économique et la production de règles. La seconde partie offre une brève application de ces différents concepts en s’appuyant sur le cas des Guerres de la morue.
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