Après une année 2019 marquée par un pic de violence inédit (massacres de populations civiles, multiples revers infligés aux forces de défense et de sécurité sahéliennes, mort de treize soldats de Barkhane au mois de novembre), les événements de 2020 semblent porter les germes d’un tournant stratégique au Sahel. Il s’agit de proposer un point de situation sur les dynamiques africaines et européennes déployées face à la crise, dont l’épicentre se situe dans les régions du Macina au Mali, du Soum au Burkina Faso et du Liptako-Gourma, dans la zone dite des « trois frontières ». Le long de la boucle du fleuve Niger, cet ensemble constitue un arc d’instabilité régionale.

Accomplissements et ruptures de 2020 : un tournant stratégique au Sahel

Début 2020, l’arrivée à Kidal du premier bataillon de l’armée « reconstituée » marque un accomplissement significatif dans la mise en œuvre des accords de paix et de réconciliation signés à Alger en 2015 entre l’État malien et les groupes rebelles de la Coordination des mouvements de l’Azawad (CMA). Ces bataillons sont composés de soldats des forces armées maliennes historiques, d’anciens combattants sécessionnistes et de groupes armés progouvernementaux, escortés par les casques bleus de la Minusma, mais également par les appareils français de Barkhane. Cet événement est emblématique de la coordination des acteurs impliqués dans le traitement de la crise. À la même période, la force conjointe G5 Sahel effectue ses premiers pas sur le terrain des opérations, dans la zone des « trois frontières ».