La guerre du Golfe est un événement historique, mais qui s’inscrit dans des temporalités différentes en fonction de l’approche retenue. Il y a à la fois des continuités et des ruptures ayant profondément modifié les organisations militaires comme en France. Cela oblige à s’interroger sur les conflictualités d’aujourd’hui.
Conclusion : la guerre du Golfe, un événement historique ?
Conclusion: the Gulf War—an Historical Event?
The Gulf War was an historical event, the importance of which may be viewed in different timescales, depending on the approach taken. Analysis reveals elements both of continuity and rupture which profoundly changed military organisations, as in France, and which should lead us to raise questions on today’s conflicts.
Dans l’immédiat après-guerre froide, ce conflit constitue une rupture. Affrontement interétatique important, il implique une très large coalition sous pilotage occidental (américain pour le dire plus clairement) dans un espace lui-même non occidental. Il ouvre ainsi la voie à une période de claire prééminence des États-Unis dans les relations internationales (ce que d’aucuns, dont Hubert Védrine, ont qualifié d’« hyperpuissance américaine ») (1). Dans le champ des opérations militaires, la guerre du Golfe se résume dans les faits à une vaste campagne aéroterrestre. Comme le montrent les différents articles de ce dossier, elle a servi de référence pour les adaptations des armées de nombreux États à partir des années 1990.
Néanmoins, ce conflit interétatique semble, par certains égards, déjà désuet au début des années 1990. En effet, le monde d’après-guerre froide se caractérise par des formes de conflictualités dans lesquelles on observe de plus en plus d’acteurs non étatiques ou transnationaux dans des guerres civiles et/ou des formes d’affrontements ensuite conceptualisés comme « hybrides ». Dès lors, après les différents champs où des « leçons » ont pu être tirées de cette guerre (qui constituent les entrées des différents articles de ce dossier), il convient d’observer la façon dont elles l’ont été et du poids de ce seul conflit dans les réformes en question. Pour le dire autrement, il s’agit de voir dans quelle mesure l’événement que représente cette courte campagne militaire est réellement constitutif des réformes mises en œuvre en ses lendemains. Est-il réellement un « tournant » ?
Nous interrogerons d’abord la notion d’« événement » militaire et la façon dont il convient de l’appréhender pour un historien, puis nous le replacerons dans une grille d’analyse clausewitzienne, non sur la conduite de la guerre en tant que telle, mais comme phénomène social dans ce monde en mutation du début des années 1990.
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