La campagne de Syrie en 1941 constituait un enjeu militaire et politique pour le général de Gaulle qui devait impérativement consolider sa position tant vis-à-vis de Londres que du régime de Vichy. Son approche de l’Orient compliqué préfigure également son pragmatisme pour faire avancer la France.
« Vers l’Orient compliqué je volais avec des idées simples », un aphorisme trompeur ?
“I flew with simple ideas into the complexity of the East”
(Vers l’Orient compliqué je volais avec des idées simples), a Misleading Observation?
The 1941 campaign in Syria was a major military and political challenge for General de Gaulle, for whom the imperative was to consolidate his position as much with respect to London as to the Vichy regime. His approach to the complicated East also foreshadowed his pragmatism in modernising France.
Le chapitre des Mémoires du général de Gaulle dont est extraite sa célèbre citation souligne paradoxalement qu’il a surtout été confronté en 1941 aux répercussions levantines de l’Occident compliqué. De plus, la simplicité que prône le Général tient alors essentiellement à la clarté de ses objectifs militaires et politiques : donner à la France Libre sa première victoire. Pourtant ce but n’est que partiellement atteint sur le terrain au terme de la campagne de Syrie.
Mais l’intérêt actuel de cet aphorisme ne se résume ni à une formule passée à la postérité, ni à une feuille de route aujourd’hui dépassée par les événements. Il est avant tout dans l’apologie de la hauteur de vue élevée au rang de principe de la stratégie pour appréhender une crise globale tant politique que militaire. Le cœur du sujet dans ce passage n’est donc pas tant l’Orient que la France mais, surtout, comment Charles de Gaulle concevait alors son approche stratégique en tant que nouveau dirigeant en temps de guerre.
L’exégèse des aphorismes du général de Gaulle est un défi intellectuel toujours enrichissant pour comprendre les enjeux de son époque et constater l’actualité des analyses du chef de la France Libre. « Vers l’Orient compliqué je volais avec des idées simples » est l’un des plus célèbres, mais est plus abscons qu’il n’y paraît. Cette phrase a été depuis abondamment reprise par les « arabisants » français qu’ils soient politiques, diplomates, militaires, journalistes, ou par les innombrables thuriféraires du Général. Elle est extraite de la partie consacrée à l’Orient dans le premier volume des Mémoires de guerre (L’Appel, publié en 1954) (1). Le général de Gaulle y décrit la campagne de Syrie à l’été 1941 dont l’objectif militaire était d’inte rdire l’ouverture d’un nouveau front par les Allemands en Irak en exploitant le territoire syrien encore sous mandat français. À travers ce passage, il dépeint tout particulièrement sa manière de commander selon une stratégie alliant les dimensions politique et militaire ainsi que les qualités humaines décrites auparavant dans Le Fil de l’épée (2).
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