La non-prolifération est un sujet complexe qui est inédit dans la durée avec des positions européennes et américaines souvent complémentaires, parfois différentes. Au-delà du nucléaire, les risques de prolifération sont une réalité dont la dimension politique est déterminante comme le démontrent les difficultés autour de l’Accord de Vienne sur le nucléaire iranien (JCPOA).
Non-prolifération : une priorité partagée de part et d’autre de l’Atlantique ?
Non-Proliferation: a Shared Priority on Both Sides of the Atlantic?
Non-proliferation is a complex and hitherto little-considered subject which leads to often complementary, though sometimes different European and American positions. Quite apart from the nuclear question, proliferation carries risks with centrally political dimensions as has been demonstrated in the difficulties encountered with the Joint Comprehensive Plan of Action (JCPOA).
La Conférence d’examen du Traité de non-prolifération nucléaire (TNP), prévue tous les cinq ans, se déroulera du 24 au 28 janvier 2022 (elle avait dû être reportée en raison de la crise de la Covid). Il est intéressant d’évaluer la position des principales puissances nucléaires signataires du Traité (P5) et, entre alliés, leur solidarité (P3). Cette dernière a contribué de manière essentielle au maintien du TNP, rôle essentiel dans un contexte où entre également en compétition, sur le plan politique, le Traité sur l’interdiction des armes nucléaires (TIAN).
Dès l’adoption de la loi McMahon, votée en 1946, les États-Unis affichent une volonté de contrôler les technologies nucléaires pour éviter la prolifération des usages militaires de l’atome. Cet objectif est perçu avec défiance en Europe, dans un contexte d’ambitions fortes de développer le secteur nucléaire à des fins civiles, mais aussi militaires. La lancée du programme Atoms for Peace, à partir de 1953, atténue les craintes des Européens sur la volonté américaine de restreindre l’accès au nucléaire. Pour autant, la diffusion de technologies civiles dans les années 1950, dont certaines sont détournées pour acquérir des matières à usage militaire, ne fait que renforcer les Américains dans leur volonté de lutter contre la prolifération des technologies sensibles. Au niveau normatif, cela se traduit par les efforts diplomatiques menés conjointement avec Moscou pour négocier le TNP, signé en 1968 et le traité d’interdiction partielle des essais nucléaires (1963). Pour ce qui est de la politique américaine, l’adoption du Nuclear Non-Proliferation Act de 1978 vise à résorber le supposé laxisme du programme Atoms for Peace. Reflétant les préoccupations du Congrès, il requiert du gouvernement une plus grande vigilance dans le transfert de composants ou technologies nucléaires, et réclame des garanties plus fortes sur l’utilisation civile des technologies exportées.
Côté européen, ces deux initiatives sont accueillies avec une certaine réserve. Concernant le TNP, tout d’abord, si certains États y sont d’emblée favorables et en sont des négociateurs actifs, comme l’Irlande, d’autres sont réticents à renoncer définitivement au droit de disposer d’une capacité de dissuasion autonome. Ainsi, en République fédérale d’Allemagne (RFA) et en Italie, la ratification du TNP fait l’objet de débats importants. À l’Otan, la question nucléaire est au cœur des préoccupations de l’administration Kennedy et de la proposition de force nucléaire multilatérale (MLF). Il faut attendre 1975 pour que ces deux États déposent leur instrument de ratification. Côté français, le traité est critiqué comme un instrument reflétant l’hégémonie des deux Grands et est rejeté jusqu’en 1992.
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