L’histoire européenne est marquée par les guerres et donc par des traités entérinant les victoires et les défaites militaires. Certains de ces accords ont pu résoudre les antagonismes avec des solutions durables. D’autres ont échoué à réconcilier les protagonistes. Mais seule la diplomatie peut achever la guerre.
La Russie, l’Europe et nous (II). Ni Yalta ni Munich, mais Helsinki
Russia, Europe and Us (II). Neither Yalta nor Munich, but Helsinki
European history is notable for its wars, and thus for the treaties that have ratified military victories and defeats. Some of these agreements have achieved lasting solutions to resolve antagonisms, whereas others have failed to reconcile the protagonists. That said, diplomacy remains the only way to put an end to war.
À l’exception notable de la Seconde Guerre mondiale à l’issue de laquelle les vainqueurs se sont trouvés immédiatement en compétition, pour employer un doux euphémisme (1), il n’est pas de guerre qui ne se soit achevée par la négociation d’un traité de paix. C’est ce qui manque cruellement à l’Europe d’aujourd’hui. Faute d’un traité de paix dans les mois qui ont suivi la capitulation allemande (2), c’est le fait accompli de l’occupation militaire sur le terrain qui a eu force de loi ; sauf à Berlin, capitale allemande conquise par la seule Armée rouge, mais occupée par les Quatre, avec toutes les tensions et crises que cette situation a occasionnées ; et en Grèce, où la compétition pour le pouvoir entre monarchistes et communistes a donné lieu à une longue guerre civile, perdue par ces derniers.
La crise actuelle entre la Russie et le reste de l’Europe dépasse donc de loin la seule affaire ukrainienne dont on lit partout qu’elle plongerait ses racines dans une faillite de la diplomatie à l’issue de la guerre froide. Cette crise, aux racines profondes, remonte en fait à 1945 et à l’absence d’une conférence globale visant à poser les nouvelles bases de la sécurité et de la stabilité en Europe. Il existe pourtant un début de précédent, la conférence d’Helsinki, en 1975, dénommée Conférence de sécurité et de stabilité en Europe (CSCE), mais qui, compte tenu du contexte de guerre froide d’alors, n’a pu que poser des principes généraux correspondant au plus petit dénominateur commun sur lequel des États appartenant à deux blocs rivaux pouvaient s’accorder, l’acte final d’Helsinki. Cela écrit, tous les chefs d’État ou de gouvernement signataires, dont Leonid Brejnev, se sont entendus pour reconnaître et garantir les frontières des États européens. Cet Acte final a été régulièrement actualisé jusqu’à ce que, en 1994, cette CSCE ne se transforme en OSCE.
Il est de plus en plus tragiquement vrai aujourd’hui que l’action régulatrice de la diplomatie en Europe ne pourra s’établir que par la réunion d’une grande conférence globale européenne, associant toutes les parties prenantes à la crise, c’est-à-dire l’ensemble des États européens, sur la base de la définition d’un nouvel ordre européen en termes de sécurité et de stabilité. À cet égard, rien ne saurait justifier le retour à une situation ante 1991, position maximaliste du Kremlin, puisqu’en réalité, cette situation était dénuée de tout fondement diplomatico-juridique.
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