L’apport des mathématiques de la décision – la théorie des jeux – contribue directement à la réflexion tactique et stratégique. La modélisation de choix possibles permet une contribution au processus décisionnel du chef militaire, sans pour autant être le seul critère d’appréciation de la situation opérationnelle.
Redécouvrir la théorie des jeux : Apport des mathématiques de la décision à la réflexion tactique et stratégique
Rediscovering Game Theory: Bringing the mathematics of decision-making to tactical and strategic thought
Game theory, the mathematical modelling of decision-making, contributes directly to tactical and strategic thought processes. Modelling of possible choices offers support to the military commander’s decision process yet without becoming the sole criterion of appreciation of the operational situation.
Djokovic doit-il servir à droite ou à gauche ? Free avait-il intérêt à investir le marché français de la téléphonie mobile ? Quelle quantité de soda les usines Pespi et Coca-cola doivent-elles produire pour optimiser leur marge ? Ces préoccupations semblent bien éloignées des questions de stratégie militaire. Elles en partagent pourtant un enjeu essentiel : la prise d’une décision dont l’issue dépendra de celle que prendront les autres. À ce titre, ces problèmes ont fait l’objet de riches analyses par les mathématiques de la décision, discipline dont on trouve les prémisses au XIXe siècle (Cournot (1)) et qui fut principalement développée entre les années 1940 (Neumann (2) ou Morgenstern (3)) et 1960 (Nash (4)) sous l’appellation de « Théorie des jeux ».
Ne nous y trompons pas : cette discipline est une chose sérieuse qui ne vous fera pas gagner au poker. Largement employée en sciences économiques et politiques, elle a connu un fort engouement dans les domaines stratégique et militaire au cours de la guerre froide. Son formalisme et sa rigueur ont fourni de précieuses clefs d’analyse des relations internationales et de la dissuasion à l’ère nucléaire, sans pour autant être la martingale parfois fantasmée.
Si la RAND Corporation (5) possède aujourd’hui encore une section entière dédiée à cette discipline, elle fait couler bien peu d’encre dans la littérature francophone. Elle constitue pourtant un formidable catalyseur de la réflexion tactique et stratégique qu’il semble indispensable de redécouvrir à l’heure où la technologie en comprime le temps sans néanmoins dissiper la complexité du champ de bataille. Pour y parvenir, il convient d’en rappeler les principes clé, avant d’en explorer trois grandes catégories d’application et d’en déduire les apports et limites.
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