L'auteur a été le chef du « planning » du BCRA, le service de renseignements de la France libre à Londres. Si nous publions ce récit, fort vivant et très intéressant par lui-même, ce n'est pas tellement en raison de sa valeur de témoignage mais pour montrer que la logique de la stratégie opérationnelle est largement dominée par la géographie. Le plus curieux est de constater que quelques hommes travaillant sans information précise sont arrivés à la même solution que l'état-major d'Eisenhower, alors que les Allemands, qui avaient certainement effectué de leur côté le même travail, ont probablement été induits en erreur par l'« intox » savamment menée par les alliés, et ont ainsi cru que le débarquement du 6 juin sur les plages normandes pouvait ne pas être l'opération principale. Il est enfin sidérant de constater que cette étude a été, pratiquement jusqu'au 6 juin, tout ce qui avait été mis à la disposition du général de Gaulle au sujet du débarquement en France.
Ajoutons que l'ingénieur général Combaux, qui vient de décéder, avait été pendant six ans membre du conseil d'administration de notre revue et était resté membre titulaire du Comité d'études de défense nationale (CEDN) qui la publie. Nous tenons donc à saluer ici sa mémoire, en rendant hommage au grand serviteur de l'État qu'il a été, dans de nombreuses fonctions importantes, et en particulier comme chef du service des Télécommunications de l'Armement.
Affecté, à mon arrivée en Angleterre, en avril 1943, à l’état-major du général de Gaulle, je manifestai mon désir de servir au BCRA (1). Le colonel Passy, qui m’avait connu comme officier de transmissions du 3e bureau du GQG, me confia la charge d’assister le commandant (plus tard lieutenant-colonel) Saint-Jacques dans la mise au point des plans de sabotage destinés à paralyser l’ennemi pendant la bataille de la Libération.
À mon entrée en fonctions, seuls avaient été esquissés un plan Vert appliqué aux voies ferrées et un plan Bibendum de harcèlement des transports sur routes. J’y ajoutai le plan Violet, sabotage du réseau téléphonique souterrain, le plan Bleu visant les réseaux électriques à haute tension, puis l’étude de directives générales concernant l’implantation des maquis et les activités de guérillas.
Les spécialistes compétents ne manquaient pas, aussi bien dans nos réseaux de résistance (résistance fer, résistance PTT, etc.) que dans les services britanniques SOE (2), pour nous aider à préciser dans chaque domaine les meilleurs procédés applicables. Saint-Jacques, qui avait à son actif plusieurs missions en France courageusement exécutées, dépensait son inépuisable énergie à recruter ses agents dans les volontaires de la France Libre. Avec l’aide des Britanniques, il les faisait initier aux procédés de sabotage et les entraînait au parachutage. Ces agents, renvoyés en France, contactaient à leur tour, dans les diverses régions, les chefs locaux du Service Action, leur distribuaient consignes et matériel et instruisaient leur personnel. Les sabotages ainsi exécutés ici et là sur le plan local avaient pour nous valeur expérimentale pour l’étude des plans de sabotage à définir sur le plan national.
Mon premier contact avec le service action du BCRA de Londres
Divergences sur les plans d’action
Création au BCRA du service de planning
Étude des conditions militaires du débarquement allié en France
Opération Normandie-Bretagne
Opération méditerranée
Conclusion