La Chine développe des stratégies d’influence médiatique dans le Pacifique Sud en utilisant une palette très large d’outils comme la formation de journalistes, le financement des médias, des voyages culturels, etc. L’objectif est d’imposer un modèle chinois censé être supérieur et plus efficace. Toutefois, et jusqu’à présent, les opinions publiques océaniennes préfèrent les médias australiens, plus fiables.
Les stratégies d’influence médiatique de la Chine dans le Pacifique Sud
Chinese Strategies for Media Influence in the South Pacific
China is developing strategies in the South Pacific for influence through the media by use of a broad range of methods which include training of journalists, financing the media and cultural travel. The aim is to impose a supposedly superior and more effective Chinese model. Up to now, however, Oceanian public opinion has preferred the more reliable Australian media.
L’influence croissante de la Chine dans le Pacifique Sud suscite intérêt et inquiétude, non seulement chez ses voisins, tels que l’Australie ou la Nouvelle-Zélande, mais également parmi les puissances européennes, et en particulier le Royaume-Uni et la France. Cette évolution rapide des équilibres géopolitiques de la région a fait l’objet de nombre d’études, rapports de think tanks ou d’agences gouvernementales et de travaux de chercheurs. Si les publications se multiplient, l’accent est toutefois mis, dans une très large mesure, sur les enjeux économiques, diplomatiques et de défense, au détriment des autres dimensions de l’influence chinoise, comme l’illustre l’intense couverture médiatique de l’accord de sécurité signé entre la Chine et les Îles Salomon (1).
Pourtant, l’influence de la Chine dans la région se déploie également dans l’espace informationnel. Pour dire vrai, la dimension informationnelle est même une partie intégrante des stratégies chinoises dans la région (2). Rien de très novateur ici, les acteurs chinois (organes liés au département de la Propagande, médias officiels, services de renseignement, etc.) appliquent dans le Pacifique des recettes qui ont fait leurs preuves sous d’autres cieux. L’objectif est toujours le même : prendre le contrôle des termes du débat public, façonner les représentations des différentes audiences, discréditer les adversaires de la Chine et présenter celle-ci de manière méliorative. L’un des vecteurs principaux en est l’appareil médiatique du Parti-État. Cet article propose un bref tour d’horizon des principales formes empruntées par les stratégies médiatiques de Pékin dans la région.
Le financement et le soutien matériel aux médias locaux
Comme ailleurs dans le monde, le premier levier de l’influence chinoise dans le Pacifique Sud est financier ; le champ médiatique n’échappe pas à la règle (3). Les médias de la région sont le plus souvent dans une situation financière précaire, dégageant des marges extrêmement faibles ; la pénétration de la Chine est donc perçue par certains médias comme une opportunité de diversification des ressources. Pékin l’a bien compris et son emprise dans la région s’appuie d’abord sur une aide financière directe aux médias. Le cas du Solomon Star, aux Îles Salomon, est emblématique de cette configuration qui favorise l’emprise de la Chine sur les écosystèmes médiatiques locaux. En 2022, ce quotidien a sollicité une aide financière de la Chine de 1 150 000 dollars des Îles Salomon (137 000 $ US). Le directeur du journal a expliqué (4) que cette demande était motivée par une dégradation rapide de l’appareil de production de la société (machines obsolètes et dysfonctionnelles) et la nécessité de construire une tour de diffusion pour sa station de radio, Paoa FM, qui peine à atteindre les zones les plus isolées.
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