Les États de Mélanésie sont au cœur de la rivalité entre les États-Unis et la Chine. L’instrumentalisation de l’histoire coloniale accroît les tensions et la situation de la Nouvelle-Calédonie – en proie à des émeutes depuis mi-mai – ne facilite pas le dialogue interrégional. Un consensus semble difficilement atteignable.
La Mélanésie, théâtre subrégional d’une rivalité globale
Japanese Strategic Reinvestment in Pacific Islands
Japan has acknowledged the strategic importance of the Pacific islands and has an integrated and multi-pronged, yet discreet approach. Tokyo has to face up to Chinese advances in the region and find partnerships with the Island states and also with larger countries such as Australia and France. Nevertheless, the resources Japan is allocating to this effort remain limited.
Les États de Mélanésie sont au cœur de la lutte d’influence que les États-Unis et la République populaire de Chine (RPC) se livrent en Océanie. Les quatre États indépendants de la région – Papouasie-Nouvelle-Guinée (PNG), Îles Salomon, Vanuatu et Fidji – reconnaissent tous la RPC qui s’est imposée ces vingt dernières années comme un de leurs principaux interlocuteurs économiques. Il faut leur ajouter la Nouvelle-Calédonie, collectivité française d’Outre-mer, seul territoire non-indépendant de la zone. Les archipels de Mélanésie font d’une histoire coloniale partagée et d’une culture commune, la base d’une identité et d’une solidarité subrégionale que porte notamment le Groupe du fer de lance mélanésien (GFLM). Dans ce contexte géopolitique mouvant, les archipels mélanésiens sont pris dans un faisceau d’intérêts qui s’expriment à l’échelle des territoires, de l’aire mélanésienne comme à celle du Pacifique insulaire.
Une Mélanésie convoitée
Située au large des côtes de l’Australie, la Mélanésie forme un arc composé de grands archipels au regard de l’étroitesse et du nombre d’îles qui caractérisent la Polynésie et la Micronésie. Les îles de Mélanésie constituent les plus grandes surfaces terrestres émergées du Pacifique insulaire et sont également les plus peuplées de la région : la Mélanésie comptait en 2023 quelque 14 millions d’habitants dont 11,8 millions en PNG et 924 000 aux Fidji. Disposant d’espaces terrestres étendus couplés à d’importantes Zones économiques exclusives (ZEE), ces archipels renferment des richesses forestières, minières et halieutiques qui attirent les investisseurs, en particulier chinois.
Or, l’Australie investit historiquement ces archipels d’une forte valeur sécuritaire, en faisant d’eux les derniers bastions de sa sécurité qu’elle pense en cercles concentriques depuis son territoire national. La politique océanienne de l’Australie est ainsi fondée sur deux objectifs forts : veiller à la stabilité politique, économique et sociale des îles du Pacifique ; et empêcher qu’une puissance hostile ne prenne pied dans une île proche de son territoire. Très inquiète des vulnérabilités des États mélanésiens, l’Australie y transpose dans les années 2000 le discours que son premier allié stratégique, les États-Unis, développait alors sur les États faillis. Canberra a ainsi désigné (1) un arc d’instabilité mélanésien qui semble de plus en plus inquiétant au gré des crises politiques qui l’agitent et de l’influence que s’y taille peu à peu la RPC. L’interventionnisme de l’Australie qui, dans les années 2000, envoie alors des conseillers de sécurité au Vanuatu, aux Îles Salomon, aux Fidji, au Timor oriental ou encore en PNG n’aboutit pas au résultat escompté auprès d’Océaniens qui l’accusent régulièrement de néocolonialisme.
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