La Chine est un acteur d’influence en Polynésie française, avec de nombreuses ambiguïtés quant à ces objectifs. Pékin essaie de pénétrer le tissu économique, politique et culturel, mais sans obtenir des résultats remarquables. La relation Paris-Papeete demeure forte même si Tahiti profite des opportunités chinoises.
Français 7 jours sur 7 ? Une appréciation de l’influence chinoise en Polynésie française
Entirely French? An Examination of Chinese Influence in French Polynesia
China is an influential player in French Polynesia, where much ambiguity surrounds its aims. Beijing is attempting to penetrate the economic, political and cultural fabric, albeit without any notable result. The relationship between Paris and Papeete remains strong even if Tahiti is taking advantage of opportunities offered by China.
« Dans le cadre du partenariat stratégique global sino-français, les relations entre la Chine et la Polynésie française pourront certainement traverser les tempêtes (1). » Après la fin des essais nucléaires, la Polynésie française (PF) est à la croisée des vents géopolitiques. Si la République populaire de Chine (RPC) ménage la France, un partenaire diplomatique utile, elle a multiplié les prises de position anti-coloniales, notamment lorsqu’elle souscrivit en 1986 au traité de dénucléarisation du Pacifique Sud (ou Traité de Rarotonga) ou soutint le droit à l’autodétermination de la Polynésie en 2013. En 2015, le programme chinois de Nouvelles routes de la soie maritime (BRI) se déploie en Océanie, incluant l’espace polynésien (2). Ainsi, Pékin renforce sa diplomatie d’influence dans un mélange de séduction et de contrainte vis-à-vis des Polynésiens, quoique de façon bien plus modérée que dans les pays océaniens indépendants.
Il convient alors de se demander si cette présence en PF contribue à un affaiblissement du lien collectivité-État. Dans les faits, l’influence chinoise au fenua (pays) est certes réelle, mais n’apparaît pas subversive. Au lieu de s’évertuer à démontrer l’existence d’une stratégie de noyautage, au-delà de considérations mercantiles, étudions plutôt la portée de l’influence de Pékin en PF via ses ramifications observables : leviers narratifs, enjeux économiques et effets politiques.
Des vecteurs narratifs imparfaits
Plusieurs canaux d’information sont censés renforcer l’influence de la Chine auprès de l’opinion publique en Polynésie française, avec toutefois une efficacité variable. Les Chinois sont arrivés sur ces territoires dès 1865, leur intégration s’est faite aux dépens de leur racine hakka (minorité ethnique). Les autorités chinoises essayent de raviver les liens historiques qui relient la Chine à sa communauté en PF et plus largement aux Polynésiens. Des activités culturelles sont organisées de manière à retracer l’origine des Austronésiens – les ancêtres des Océaniens – à la Chine. Un musée dédié à cette histoire commune sera inauguré dans la province côtière du Fujian. Pékin récupère de fait la « diplomatie austronésienne » (3) de Taipei, en écho à la « famille du Pacifique » développée par Canberra. En 2014, Gaston Flosse, alors président de la Polynésie française, déclarait déjà : « Nous descendons des Chinois. Et non pas des Gaulois (4) ! » Pour ancrer son action sur le terrain, la Chine s’attache à valoriser la contribution au développement local des sino-polynésiens, dans une promotion des valeurs confucéennes. Il se trouve pourtant qu’une grande partie de cette communauté est issue d’une minorité persécutée et pro-nationaliste en Chine, qui a été ensuite assimilée et christianisée (5).
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