Depuis plus de 8 000 ans, les biotechnologies (BT) ⁽¹⁾ n’ont cessé de progresser avec de nombreuses bio-innovations dans les domaines de l’alimentation ⁽²⁾, de la santé, de l’agriculture, des biens de consommations, de l’énergie, des matériaux et dans une moindre mesure dans celui de la défense. Les avancées dans le séquençage de l’ADN, la génomique ainsi que plus récemment la convergence de la biologie, de l’ingénierie, des sciences physiques, des nano-technologies, du numérique et de l’Intelligence artificielle (IA) sont les étapes successives échelonnées sur une trentaine d’années d’une véritable bio-révolution ⁽³⁾. Pour participer au débat stratégique sur l’innovation et la guerre à l’horizon 2040, il est donc opportun de présenter la situation des projets de BT dans la défense occidentale, les orientations qui y sont prises et qui préfigurent leurs futures applications dans les armées, les freins à l’innovation dans ce secteur et enfin, des mesures pour accompagner cette bio-révolution dans la défense française.

Projets et orientations des BT dans la défense

Aux États-Unis, leader mondial des industries des BT et de l’armement, le Department of Defense (DoD) mène depuis 25 ans des recherches et développements sur les applications des BT dans la défense ⁽⁴⁾. En 2022, les applications les plus porteuses dans la défense étaient, selon l’industrie américaine, les suivantes ⁽⁵⁾ :

L’Organisation du Traité de l’Atlantique Nord (Otan) qui a diffusé officiellement sa stratégie pour les biotechnologies et l’human enhancement ⁽⁶⁾ en février 2024 prévoit, à l’horizon 2040, des applications dans la détection de menaces Nucléaires, radiologiques, biologiques et chimiques (NRBC) avec des bio-senseurs ⁽⁷⁾ augmentés par l’IA et dans l’accroissement de la résistance, de la légèreté, de l’auto-réparabilité et de la rapidité de production des matériaux ainsi que dans une baisse de leur toxicité ⁽⁸⁾. L’Otan voit aussi dans les BT un moyen de diminuer les dépendances stratégiques des chaînes d’approvisionnement défense, en particulier en optimisant l’extraction et le recyclage des terres rares dont la Chine assure aujourd’hui plus de 60 % de la production mondiale.