Parmi les innombrables questions que soulève la tragédie du 11 septembre 2001, figure celle du sentiment qui guide les auteurs des attentats : la haine de l'Occident. L'univers des relations internationales est présenté comme un monde de calculs froids. Il n'en est rien, les émotions, les sentiments y pèsent très lourd ; ainsi la haine. Le choc de la modernité occidentale, en brisant toutes les barrières, en promettant à l'individu le droit au bonheur, conduit chacun à comparer sa situation à celle de l'autre, suscitant toutes sortes de frustrations. De même que la haine de la bourgeoisie fut un moteur historique dans l'Europe des XIXe et XXe siècles, la haine de l'Occident marque les rapports Nord-Sud. Celle-ci peut-elle acquérir le rôle politique central qu'eut celle-là dans l'Europe de la première moitié du XXe siècle ? Deux conditions doivent être réunies : cette haine doit disposer de machines politiques, en clair d'États, qui fassent d'elle le vecteur de projets (comme le furent l'Allemagne nazie ou le Japon impérial) ; cette haine doit être portée par le climat de l'Europe, et inspirer les relations inter-étatiques. Pour le moment, ces conditions ne sont pas réunies.