La Cour des comptes
La Cour des Comptes a toujours présenté, pour le profane, un caractère quelque peu mystérieux. De quels comptes s’agit-il, ne manque-t-on pas de se demander, et pourquoi faut-il que ce soit un organisme à caractère judiciaire qui ait à s’en occuper ? Le silence dans lequel s’effectuent les travaux de la Cour, qui n’a pas affaire aux particuliers mais à des fonctionnaires ou à des administrations, n’est pas pour rendre intelligible cette énigme. Seuls quelques actes plus spectaculaires, tels que le dépôt sur le bureau des assemblées parlementaires, par le premier Président, du rapport public de la Cour, rompent à intervalles assez éloignés ce silence et font connaître, ou rappellent que, dans le contrôle supérieur des finances publiques, la Cour occupe une place très élevée. À l’occasion de l’accomplissement récent de cette formalité après une interruption prolongée due à la guerre, quelques précisions sur l’institution et ses origines ne seront sans doute pas inutiles.
Avant tout, il importe d’indiquer, sommairement pour l’instant, quelle est la mission de la Cour. Celle-ci est une magistrature placée au sommet du système financier de la France pour juger les comptes des comptables, pour vérifier l’exécution des lois et règlements sur la perception et l’emploi des deniers du Trésor, des départements, des communes, des colonies, des offices et établissements publics, pour contrôler l’exactitude des comptes des ministres et des administrations et la régularité de leurs opérations. Statuer sur les comptes des comptables de deniers publics ; relever les irrégularités imputables à l’administration et les défectuosités dans la marche des services publics constatées à cette occasion ; renseigner le Parlement sur l’exécution du budget de l’État ; faire connaître aux Pouvoirs publics ses observations les plus importantes ; suggérer, s’il y a lieu, des réformes, — tels sont donc les buts essentiels de l’activité de la Cour.
De tout temps, le contrôle de l’emploi des deniers publics a été reconnu nécessaire, mais il va sans dire que l’organisation et le rôle du corps ou des agents chargés de cette fonction ont considérablement varié suivant les époques et les régimes. D’une manière générale, les attributions relatives à l’apurement proprement dit des comptes des comptables ont pris naissance avant les autres, car elles répondent à une nécessité en quelque sorte inéluctable. La mission de contrôle des finances publiques, qui suppose un pouvoir d’appréciation des actes de l’administration et du Gouvernement, n’a pu se développer qu’à mesure que les institutions prenaient un caractère plus libéral. L’histoire de la Cour des Comptes illustre cette évolution.
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