La vivacité voire la virulence des débats politiques, en France, lors des étapes successives de la construction européenne, entre « souverainistes » et partisans d'une Europe politique plus intégrée, souligne bien l'acuité de la question de la souveraineté dans notre pays. Confrontée aux multiples évolutions contemporaines et à la nécessité de vivre en bonne intelligence dans un espace physique partagé, la France doit rechercher de nouvelles voies pour intégrer, sans s'y dissoudre, cette nouvelle communauté de destin, l'influencer et mieux cerner dans ce contexte les conditions de sa souveraineté en matière de sécurité et de défense;
Souveraineté nouvelle, souveraineté composite
Le traité de Westphalie, signé en 1648 après la guerre de Trente Ans, a institué les États-nations, souverains sur leur territoire. Cette souveraineté a été la pierre angulaire de l’organisation des États en Europe, puis dans le monde entier. En France, l’inconscient collectif y attache sans doute une importance plus grande qu’ailleurs, tant un État fort y a constitué le ciment de la nation. D’abord manifestée par la toute-puissance du roi : « l’État, c’est moi ! », la souveraineté trouve sa traduction explicite dans la constitution française en 1791 : « La souveraineté est une, indivisible, inaliénable et imprescriptible ». C’est aussi en France qu’elle s’articule pour la première fois avec les prérogatives du citoyen qui décide de son sort collectif par l’intermédiaire des représentants qu’il désigne.
Cependant, de nombreuses évolutions — provoquées, consenties ou subies — de l’environnement international sont venues bousculer cet ordre bien établi. L’effondrement du pacte de Varsovie a d’abord provoqué l’éclatement des derniers « empires » et laissé libre cours à la résurgence d’antagonismes ancestraux. La communauté internationale a dû lancer, dans une perspective de stabilité, des opérations de maintien de la paix, mettant à mal le principe de non-ingérence, corollaire de la souveraineté. Ensuite, la mondialisation des échanges, des capitaux, des technologies bouscule désormais l’équilibre des relations entre les États, mais participe aussi à la transformation de la relation entre le citoyen et l’édifice politique. L’émergence enfin de réseaux transverses, terroristes ou mafieux, menace régulièrement la stabilité des pays sans qu’aucun ne puisse s’en prémunir seul.
Ce nouveau « paysage » dont l’analyse permettra de situer le cadre de notre réflexion est de nature à nous faire adopter, pour la France, un nouveau concept de souveraineté : la souveraineté composite (1).
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