Défense en Europe - Le rôle de l'OSCE dans la défense de l'Europe
Toute intervention militaire doit avoir une caution juridique. Pour les opérations de maintien de la paix et leurs compléments, cette préoccupation consiste à prévoir que les troupes ne peuvent être engagées que sous mandat international, lequel peut provenir — par exemple — de l’ONU ou de l’OSCE. On connaît le processus mis en œuvre par les Nations unies, on n’a pas eu l’occasion de voir fonctionner les mécanismes de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) qui réunit 55 États :
Albanie, Allemagne, Andorre, Arménie, Autriche, Azerbaïdjan, Belgique, Biélorussie, Bosnie-Herzégovine, Bulgarie, Canada, Chypre, Croatie, Danemark, Espagne, Estonie, États-Unis, Finlande, France, Géorgie, Grèce, Hongrie, Irlande, Islande, Italie, Kazakhstan, Kirghizistan, Lettonie, Liechtenstein, Lituanie, Luxembourg, Macédoine ou ARYM, Malte, Moldavie, Monaco, Norvège, Ouzbékistan, Pays-Bas, Pologne, Portugal, Roumanie, Royaume-Uni, Russie, Saint-Marin, Saint-Siège, Slovaquie, Slovénie, Suède, Suisse, Tadjikistan, Tchèque (Rép), Turkménistan, Turquie, Ukraine, Yougoslavie (Rép. fédérale).
L’OSCE accueille en outre : deux partenaires pour la coopération (Japon et République de Corée) ; six partenaires méditerranéens pour la coopération (Algérie, Égypte, Israël, Jordanie, Maroc, Tunisie).
Nous rappellerons donc ici, brièvement ce qu’est l’OSCE, les résultats qui lui sont attribuables et les moyens dont elle dispose pour les atteindre.
De la CSCE à l’OSCE
Avant d’être une organisation, l’OSCE était un forum officiellement créé à Helsinki le 3 juillet 1973 sous le nom de CSCE. C’était l’aboutissement d’une proposition soviétique qui, depuis 1954, demandait la signature d’un texte juridiquement contraignant pour confirmer les frontières européennes et fixer les grandes lignes d’une coopération économique Est-Ouest. Le cas de Berlin divisé, l’invasion de la Hongrie, l’attitude de la Pologne d’un côté, la réticence à accepter la participation des États-Unis et du Canada de l’autre, ont ralenti l’aboutissement du projet soviétique jusqu’à la signature, par 35 États, de l’Acte final d’Helsinki le 1er août 1975.
Il est souvent fait référence à cet acte final qui comprend trois « corbeilles » regroupant les sujets propices à instaurer la confiance, à savoir :
– les aspects politico-militaires de la sécurité et les mesures de confiance (Confidence-Building Measures, CBM) ;
– la coopération scientifique, économique et environnementale ;
– la coopération dans le domaine humanitaire.
C’est donc surtout la première corbeille qui concerne la défense ; elle propose dix principes pour cadrer les relations entre les États participants :
1) Respect des droits relatifs à la souveraineté.
2) Refus de l’exercice de la menace et de l’usage de la force.
3) Inviolabilité des frontières.
4) Intégrité territoriale des États.
5) Règlement pacifique des différends.
6) Non-intervention dans les affaires intérieures.
7) Respect des droits de l’homme.
8) Droit des peuples à l’autodétermination.
9) Coopération entre États.
10) Soumission au droit international.
Ce « décalogue » devait fournir les bases de négociations ultérieures sur les aspects politico-militaires. Ainsi fut fait jusqu’en 1990 et la CSCE fonctionnait au rythme des conférences qui établissaient les normes et les obligations à respecter. L’objectif était d’éviter une escalade entre des pays en état de tension (comme c’était le cas pendant la guerre froide) car on craignait beaucoup, à l’époque, qu’une interprétation erronée portant sur des activités militaires ne déclenchât intempestivement une agression.
À la conférence de Paris il fut décidé de confier à la CSCE un rôle dans la conduite des changements entraînés par la fin de la guerre froide. Cette réorientation imposa une nouvelle façon de travailler, et le sommet de Budapest, en 1994, estima que la CSCE devenait plutôt une organisation qu’une collection de réunions. Le sommet de Lisbonne, en 1996, entérina cet avis et la CSCE devint OSCE avec de nouvelles structures destinées à mettre en œuvre la « Charte sur la sécurité en Europe ».
Les résultats de l’OSCE
Le traité FCE (CFE)
En 1978, le président Giscard d’Estaing propose qu’une conférence sur le désarmement en Europe (CDE) soit organisée de telle sorte qu’elle permette à tous les États d’y participer, d’où le choix du cadre adéquat, la CSCE. C’est le début d’une longue lutte diplomatique entre les tenants des négociations de bloc à bloc (Otan-Pacte de Varsovie), et ceux qui souhaitent la participation individuelle de tous les États. Finalement ces derniers l’emportent et le traité sur la réduction des forces conventionnelles en Europe (FCE) est signé le 19 novembre 1990 à Paris par 23 États. Les plafonds et réductions d’armement concernaient la zone ATTU — l’Europe de l’Atlantique à l’Oural — divisée en quatre sous-zones.
L’effondrement de l’URSS et l’accession à l’indépendance des républiques constitutives des sous-zones allaient rendre difficiles l’exécution et le contrôle de l’application du traité. Aussi un accord d’adaptation est signé le 19 novembre 1999 à Istanbul, prenant en compte les bouleversements survenus en neuf ans et donnant des garanties à la Russie qui s’inquiétait de l’élargissement de l’Otan.
Ciel ouvert (Open Sky)
L’autre résultat important obtenu dans le cadre de l’OSCE est le traité Open Sky. Il s’agissait d’établir un régime de survol des pays concernés au moyen d’aéronefs d’observation non armés.
L’idée n’était pas nouvelle puisque le président Eisenhower l’avait déjà suggérée en 1955, mais ce n’est qu’à Ottawa, le 12 février 1990, qu’une initiative hongro-canadienne lança les négociations aboutissant à la signature du traité à Vienne le 24 mars 1992. L’entrée en vigueur du traité vient d’avoir lieu, le 1er janvier 2002, soixante jours après le dépôt des instruments de ratification par la Russie et le Bélarus (il en fallait vingt). Cette longue période a été mise à profit pour effectuer 350 missions expérimentales.
Si les traités FCE et Ciel ouvert sont les deux principaux résultats obtenus dans le cadre de l’OSCE, son activité s’exerce dans de nombreux autres domaines tels que le respect des droits de l’homme, de la démocratie, de la liberté de la presse. Dans le domaine militaire, l’OSCE ne peut conduire, soit directement soit par l’intermédiaire de l’Alliance atlantique ou de l’Union européenne, que des opérations de maintien de la paix, sous réserve du consentement de toutes les parties. Par contre, les missions d’assistance et de contrôle amènent l’OSCE à être présente sur le terrain en de très nombreux endroits comme le Kosovo, la Bosnie, l’Estonie, la Géorgie etc.
Pour accomplir ces tâches l’OSCE s’appuie sur une organisation permanente qui comprend les trois niveaux ministériel, fonctionnel-opérationnel, parlementaire. Nous mentionnerons les organismes qui traitent principalement des questions de sécurité et de défense.
Quelques organismes de l’OSCE
L’OSCE dispose de plusieurs organismes favorisant le règlement pacifique des différends :
– le comité des hauts fonctionnaires qui examine les violations des principes de l’acte final d’Helsinki ainsi que les désordres susceptibles de perturber la sécurité et la stabilité ;
– le haut-commissariat aux minorités nationales chargé d’enquêter sur les tensions ethniques génératrices de crises ;
– le groupe consultatif interarmées chargé de surveiller l’exécution du traité CFE ;
– le comité consultatif « Ciel ouvert » chargé de surveiller l’exécution du traité (Open Sky) ;
La direction de tous les organismes fonctionnels-opérationnels est assurée par une présidence tournante au rythme annuel travaillant en troïka. Il s’agit actuellement d’Antonio Martins da Cruz (Portugal) entouré de la présidence précédente (Roumanie en 2001) et de la présidence suivante (Pays-Bas en 2003).
Les objectifs de la présidence portugaise
La présidence portugaise poursuit huit objectifs :
1) Renforcer le dialogue politique au sein de l’OSCE.
2) Restaurer l’équilibre entre les trois dimensions de l’OSCE : dimension humaine, dimension économique et environnementale, dimension politico-militaire.
3) Renforcer les trois piliers de l’activité de l’OSCE : prévention des conflits, résolution pacifique des conflits, restauration post-conflictuelle.
4) Développer le concept de « plate-forme pour une sécurité coopérative » adopté à Istanbul.
5) Promouvoir le rôle de l’OSCE dans la lutte contre le terrorisme.
6) Renforcer les capacités fonctionnelles et opérationnelles de l’OSCE.
7) Encourager la coopération avec les autres zones géographiques.
8) Approfondir la coopération avec la société civile. ♦