Marine nationale - La réserve militaire rejoint le cœur de la Marine
Face à l’évolution du contexte stratégique, le président de la République décide en 1996 la professionnalisation des forces armées. L’appel aux conscrits est progressivement suspendu.
Dans la logique de cette décision, une nouvelle organisation des réserves militaires est adoptée ; c’est l’objet de la loi du 22 octobre 1999. Le concept de mobilisation générale autoritaire est abandonné et fait place à celui d’une réserve militaire volontaire et sélectionnée apportant son soutien quotidien aux activités de toutes sortes des forces armées professionnalisées.
Il s’agit bien là d’une révolution et non pas d’une simple évolution.
Une réserve militaire moins nombreuse mais plus engagée
La loi du 22 octobre pose comme principe que le réserviste militaire est un citoyen qui fait acte volontaire de servir dans la réserve militaire. Ce volontariat est agréé par l’autorité militaire pour une période donnée et renouvelable. Il s’agit donc bien d’un contrat entre le réserviste et son armée.
Avec la suspension du service national, les réservistes viennent de deux origines. Il s’agit :
– soit d’anciens militaires qui apportent aux armées leurs compétences et expériences militaires, mais aussi éventuellement leurs nouvelles aptitudes ;
– soit de membres issus directement de la société civile. Dans la Marine, ceux-ci sont plus particulièrement recrutés pour leurs compétences générales et professionnelles directement exploitables plutôt que pour des tâches militaires nécessitant une formation préalable longue. La principale exception concernera les hommes du rang.
À ces deux catégories de volontaires, la loi a prévu d’adjoindre les anciens militaires d’active, lesquels sont astreints à disponibilité jusqu’à cinq ans après leur retour à la vie civile. Il serait fait appel à ces « réservistes obligés » en cas de nécessité absolue liée à une circonstance particulière. Pour la Marine, il s’agit là d’environ 15 000 personnes.
Une réserve d’emploi
La réserve militaire issue de la loi de 1999 est une réserve d’emploi. Le citoyen qui se porte volontaire le fait pour se mettre réellement et concrètement au service de son armée. La loi a prévu un dispositif très souple qui permet de prendre en compte les préoccupations des trois parties prenantes : le réserviste, l’armée, le système socio-économique dans lequel le réserviste évolue habituellement. Ainsi, le réserviste peut-il servir : soit au sein d’une unité de la Marine, soit dans son environnement social habituel.
Dans le premier cas, il sera affecté dans cette unité pour une durée d’activité annuelle précise pour exercer en son sein un emploi défini. Il sera alors rémunéré et qualifié de réserviste opérationnel.
Dans le second cas, il sera collaborateur bénévole du service public et qualifié de réserviste citoyen. Il s’agit alors d’exploiter au profit de son armée les réseaux civils du réserviste.
Pour être acceptable par tous, la réserve militaire ne devait pas perturber gravement l’activité socio-économique du pays. Le législateur a donc limité à trente jours par an l’activité du réserviste opérationnel, cette durée pouvant être elle-même fractionnée selon un programme établi en accord entre le réserviste et son commandant. Des extensions sont possibles dans certains cas et notamment lorsque l’unité est déployée en opérations.
Enfin, pour tenir compte d’une part des préoccupations immédiates du réserviste, qui à un instant donné peut, malgré son souhait de servir au sein des forces, ne pas avoir pour des raisons légitimes la disponibilité nécessaire, et d’autre part des souhaits de la Marine de garder un flux régulier de recrutement et de renouvellement de sa réserve militaire, donc de ne pas figer son dispositif de réserve opérationnelle, le passage de la situation de réserviste opérationnel à celle de réserviste citoyen, et inversement, est considéré comme naturel et s’exercera sans a priori, au seul regard in fine des besoins de la Marine.
Quels emplois pour la réserve militaire de la marine ?
Les emplois de la réserve opérationnelle sont rémunérés. La loi de programmation militaire a donc fixé leur nombre ; pour la Marine : 6 500.
L’état-major de la Marine a précisé le contour de la pyramide de grades correspondante et à définir, après une analyse des besoins des forces, les postes à pourvoir. Il s’agit schématiquement de 5 900 postes permanents :
– 1 800 postes liés à la conduite des opérations navales, interarmées et interalliées ; à ce titre le commandant de la force d’action navale disposera prochainement d’un module pour faire face à l’indisponibilité subite d’un membre d’équipage d’un des bâtiments ;
– 900 postes dans le cadre de la sauvegarde maritime (sémaphores, gendarmerie maritime, pompiers…) ;
– 2 000 postes pour la protection défense des installations sensibles ;
– 1 200 postes pour le soutien de la chaîne « ressources humaines » dans les centres d’instruction, de recrutement, de reconversion de la Marine.
Enfin, un volant de 600 postes budgétaires est affecté chaque année par l’état-major de la Marine pour faire face à un besoin inopiné et temporaire.
Tous les réservistes de la Marine participent à sa promotion au sein de leurs cercles habituels. Ils concourent à faire prendre conscience à nos concitoyens des enjeux de la défense, de l’importance d’une politique maritime et navale. Ils suscitent des recrutements et facilitent la reconversion d’un personnel bien formé.
Ces actions bénévoles peuvent s’exercer dans le cadre de conventions individuelles ou par l’intermédiaire des associations et notamment l’Acoram et l’Acomar, les deux associations de réservistes de la Marine, lesquelles ont récemment actualisé leurs statuts pour prendre en compte la situation nouvelle.
Les centres d’information de la réserve de la Marine (Ciram) répartis sur l’ensemble du territoire métropolitain et outre-mer, relayés par un réseau départemental (des réservistes sous contrat ESR), servent d’interface entre le réserviste et son employeur militaire. Ils assurent la recherche de la meilleure adéquation entre les besoins de l’institution et les compétences que les réservistes souhaitent mettre à sa disposition.
L’importance stratégique des préparations militaires
Une quarantaine de centres de préparation militaire « marine » permet à 1 200 jeunes gens, de 17 à 22 ans environ, d’avoir une première information sur la Marine au cours d’un stage annuel. À l’issue, les volontaires peuvent intégrer la réserve militaire pour des emplois à temps partiel de fusilier-marin, guetteur sémaphorique, secrétaire d’état-major, etc. Ce fut le cas cet été pour 250 d’entre eux.
Pour les jeunes gens en études supérieures, trois formules de préparations militaires supérieures tenant compte de leur cursus leur permettent d’accéder aux emplois d’officiers de réserve. Ainsi, la PMS marine marchande maintient le lien souhaitable entre nos deux marines et participe au parcours qualifiant des élèves des écoles de la marine marchande en leur permettant d’effectuer à bord des bâtiments de la Marine leurs périodes d’embarquement obligatoires dans le cadre de leurs études. De même, la PMS état-major offre des formations complémentaires et des emplois aux étudiants des filières défense, droit, relations internationales. Notons que 12 jeunes auditeurs IHEDN figurent parmi les 42 stagiaires retenus pour la 1re session de cette nouvelle PMS proposée par la Marine.
Par ce dispositif, la Marine espère pouvoir recruter chaque année, directement dans la société civile, 500 à 800 marins et 150 officiers pour sa réserve militaire… qu’il s’agira ensuite de fidéliser.
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Hier en position de satellite, la nouvelle réserve militaire a rejoint aujourd’hui le cœur de la Marine et participera activement à son fonctionnement quotidien et au succès de ses missions. C’est là la clé de la fidélisation de ces volontaires.
Janvier 2003