Djildix ou le chant des monts célestes [roman]
René Cagnat est familier de l’Asie centrale. En 1991, il nous en avait joliment parlé, mais en politologue, dans Le milieu des empires (Laffont). C’est en poète et sociologue qu’il y revient ici. Aux confins du pays des Kirghizes et du Xinjiang chinois, des hommes rudes subsistent sur une terre tourmentée. D’énormes montagnes servent d’écrins à des oasis inattendues et des vallées charmantes. La steppe offre son « tapis de soie » à ces grands cavaliers, et Joseph Kessel a popularisé leur jeu favori, d’intrépides jeunes gens se disputant à cheval la dépouille d’un bélier.
L’histoire est étrange. S’y mêlent coutumes locales, restes de la domination soviétique (nous sommes en 1995), banditisme moderne à la frontière de Chine. « Djanibek, fils de Toursounbaï, Kirghize de l’Issyk-Koul », est en rupture de tradition. Fils d’un ex-colonel et héros de l’Union soviétique, il a beaucoup vécu en France. Il revient au pays à la mort de son père, dont il convient de ramener vers la sépulture familiale... la tête. Le voyage sera long et périlleux, en compagnie de la jeune Djildiz, voix d’or et doigts agiles sur le komouz, qui est la mandoline kirghize. Le couple, très amoureux, affrontera loups, ours, trafiquants de drogue, guérilleros tadjiks, et l’ombre inquiétante de l’homme des neiges. La fin du voyage est affreuse : Djildiz périra emportée par une coulée de boue dans la Vallée maudite et le pauvre Djanibek se donnera la mort. Reposent, au pied de la montagne sacrée du Khan-Tengri, la tête de Toursounbaï, le corps de Djanibek et la mandoline brisée de Djildiz.
En note finale, l’auteur nous dit que cette belle histoire tient en trois cahiers d’écolier, journal de Djanibek qui lui fut remis par un vieux mollah. Vrai, faux ? Réponse à la convenance du lecteur. ♦