La guerre psychologique (I)
La guerre marque le heurt de deux volontés. L’une des deux doit céder, soit sous l’effet d’une force matérielle, soit sous la suggestion d’une volonté supérieure. La guerre psychologique vise à modifier, dans un sens déterminé, le comportement des individus — adversaires ou alliés — en agissant sur leur intelligence, leur esprit, leur conscience… sans qu’il soit directement fait appel à la violence matérielle. Il apparaît, dès l’abord, qu’elle représente la forme la plus perfide de la guerre puisqu’elle utilise tous les procédés susceptibles d’atteindre le cœur de l’homme, son intelligence et sa sensibilité. Elle est permanente, puisqu’aussi bien c’est à chaque minute de sa vie que l’homme peut être atteint dans ses pensées ou ses sentiments. Elle ne connaît donc ni trêve ni armistice. Le temps de paix se révèle même infiniment plus propice pour elle que le temps de guerre, grâce à la multiplicité des voies qui s’ouvrent alors à son action.
Aussi vieille que le monde, il fallut attendre le XXe siècle pour voir la guerre psychologique jouer le rôle capital qui est le sien aujourd’hui. Autrefois, le caractère rudimentaire des moyens techniques de diffusion de la pensée rendait difficile et lente toute action psychologique sur des masses. La bataille était le procédé commode et rapide et la solution intervenait dans des limites restreintes d’espace et de temps. La guerre psychologique se réduisait alors à cette action psychologique sur les combattants dont Ardant du Picq a parlé avec tant d’autorité (1). Son rôle, dans la victoire, était certes considérable et tout le génie d’Hannibal est d’en avoir usé avec une suprême habileté. Mais son champ d’action était restreint. Elle ne sortait point de la compétence des chefs de guerre. Elle ne constituait que l’un des éléments de la stratégie militaire.
Au fur et à mesure que s’accélérèrent les progrès scientifiques et techniques, la guerre changea radicalement d’aspect. Il ne fut plus question d’une affaire à régler en champ clos entre quelques spécialistes, mais toutes les couches de la société se trouvèrent peu à peu appelées à y prendre une part active. En dehors des combattants, chacun devint un producteur ou une victime possibles.
Il reste 89 % de l'article à lire
Plan de l'article