Hollywood, le Pentagone et Washington (Les trois acteurs d'une stratégie globale)
Par la production de films dits de « sécurité nationale », les studios d’Hollywood se révèlent être un acteur essentiel du débat stratégique américain, une position qui s’exprime à travers des genres variés, le thriller, la science-fiction, la saga historique, voire la comédie. Nous avons là le premier ouvrage cherchant à décrypter les relations très particulières qui se sont nouées entre Hollywood, les forces armées et le pouvoir politique. Docteur en études stratégiques et en sociologie de la défense, chercheur au Centre interdisciplinaire de recherche sur la paix et d’études stratégiques (Cipres), Jean-Michel Valentin, détaille la véritable collaboration qui unit ainsi depuis la Seconde Guerre mondiale les armées américaines et les studios de cinéma.
À travers l’analyse fine des films les plus célèbres, il démontre comment Hollywood est totalement pénétré des évolutions politiques et idéologiques du pouvoir politique américain d’une part, mais aussi technologiques des forces armées d’autre part. En première analyse, tout en offrant une vision du monde suffisamment pertinente pour inspirer les dirigeants politiques, explique l’auteur, le cinéma de sécurité nationale américain, unique en son genre dans le monde, se présente comme un miroir des évolutions géopolitiques et des préoccupations du citoyen américain. C’est ainsi que ce cinéma a successivement été marqué par la guerre froide (Docteur Folamour), la fin de l’URSS (Octobre Rouge), et l’émergence des nouvelles menaces (La somme de toutes les peurs).
L’auteur nous montre aussi que les studios sont le champ d’une compétition médiatique entre les différents services, l’US Air Force (Air Force One), l’US Navy (Top Gun, Octobre Rouge, À armes égales), l’US Army (Black Hawk down, Sauver le Soldat Ryan) ou encore les services secrets (Spy Game). L’auteur nous explique également pourquoi, excepté deux films (À l’épreuve du feu et Les rois du désert), le thème de la guerre du Golfe n’a pas été traité par Hollywood. Pour leur part, Star Wars ou Independance Day ont fortement soutenu le lobby du Space Power. Dans ce registre, suite au programme d’Initiative de défense stratégique (IDS) lancé par Ronald Reagan en 1983, la désignation du programme de bouclier spatial antimissiles balistiques est directement inspirée par le film Star Wars et ses armes laser.
De même, l’auteur estime que le nouveau projet de Missile Defense a su tirer profit des films construits autour du thème de l’attaque de Pearl Harbor. À ce titre, rendons aussi hommage au documentaire L’autre guerre des étoiles diffusée sur la chaîne Arte le mercredi 7 janvier 2004 pour avoir présenté les termes du débat sur le bouclier antimissiles américain à travers ses dimensions politiques, technologiques et psychologiques, complétant ainsi avec pertinence l’information donnée dans ce livre passionnant.
Comme on pouvait s’y attendre au fil des pages de cette étude, les films tirés des thrillers technologiques de Tom Clancy, (Octobre Rouge, Jeux de Guerre, Danger Immédiat, La somme de toutes les peurs) font l’objet d’un soin particulier. Désormais, en refermant ce livre, on s’attend à ce qu’Hollywood soit maintenant inspiré par l’ère post-11 septembre, bien que des actes terroristes de la nature de ceux frappant New York et Washington ce jour-là aient été anticipés dès les années 1990 par de nombreux films. ♦