Eufor RD Congo a marqué le premier engagement militaire allemand en tant que nation-cadre européenne en Afrique. 2006 voit également la publication du nouveau Livre blanc sur la politique de sécurité qui remplace un précédent Weißbuch zur Sicherheitspolitik datant de douze ans. Dans le cadre de ses prochaines présidences du G8 et de l'Union européenne, Berlin fera figurer l'Afrique parmi ses priorités. Il s'agit de l'occasion de revenir sur l'approche allemande en matière de paix et sécurité sur ce continent.
Conscient du caractère incontournable d'une réponse commune face aux enjeux globaux et de long terme posés par un continent en pleine mutation sociale et démographique, Berlin participe tout comme Paris à la définition des concepts destinés à articuler la stratégie africaine de l'Union européenne de décembre 2005. Pour ce qui concerne son volet de paix et de sécurité, la persistance d'une ambiguïté du rapport franco-allemand est cependant perceptible.
Africa as seen by Germany
The Democratic Republic of the Congo EUFOR (EUFOR DRC) marks the first German military engagement as a European framework nation in Africa. 2006 saw the publication of a new white paper on the security policy that will replace the preceding Weissbuch zur Sicherheitspolitik that dates back 12 years. In the context of its presidencies of the G8 and the European Union, Berlin will include Africa among its priorities. Now is the time to re-examine the German approach to peace and security in that continent. Berlin is aware of the inescapable need for a common response in the face of the long-term global issues raised by a continent undergoing profound social and demographic changes. Like Paris, it is participating in the definition of concepts designed to implement the European Union’s African Strategy of December 2005. However, as far as the peace and security aspects of this strategy are concerned, some ambiguity in the Franco-German position remains.
« L’Allemagne s’implique, dans la limite de ses moyens, dans des missions de stabilisation de longue durée. Cet engagement ne peut être que multilatéral et doit s’inscrire dans le cadre de la stratégie africaine de l’UE. Essentiels, les enjeux africains seront au cœur de la future présidence allemande de l’Union. Le gouvernement fédéral pourrait dans le même temps saisir l’occasion de sa présidence au G8 pour associer la Chine et l’Afrique à une stratégie globale des Nations unies pour l’Afrique. » Dr A. Schockenhoff, vice-président du groupe parlementaire CDU/CSU au Bundestag
Berlin et l’Afrique : la sortie progressive du prisme du « tout-développement »
Les priorités retenues par le gouvernement Merkel pour le sommet du G8 de Heiligendamm (juin 2007) évoquent l’Afrique sous l’angle de la « bonne gouvernance, [des] investissements durables, [et de la] paix et [la] sécurité ». Le contrat de coalition de novembre 2005 avait déjà affirmé l’engagement de l’Allemagne pour ce continent. Pour sa part, le président fédéral H. Köhler, dont la fonction est éminemment morale, avait lancé une initiative pour un dialogue entre les hommes politiques, les chercheurs et les sociétés civiles africaine et européenne intitulée « Partnerschaft mit Afrika ». Par sa formule « Afrika ist für uns alle wichtig ! » (1), cet ancien directeur général du Fonds monétaire international souligne que la vision allemande se veut globale et transversale. En phase avec l’adoption par le Conseil de l’Union européenne d’une stratégie pour l’Afrique (19 décembre 2005), cette approche, qui inclut un volet de paix et de sécurité, ne peut se comprendre sans un retour sur le demi-siècle écoulé.
Aux sources d’une position originale
L’Allemagne n’est pas dénuée de tradition africaine (2), mais a été privée de ses colonies dès 1918. Au sortir de la seconde guerre mondiale, la République fédérale s’est orientée vers une politique de coopération civile et d’aide au développement. Ainsi, durant la guerre froide, elle a laissé les vainqueurs de 1945 gérer les intérêts sécuritaires du camp occidental en Afrique, s’interdisant notamment d’interférer dans les anciennes colonies françaises. Avec la réunification allemande de 1990, Bonn n’a pas souhaité endosser les actifs partisans d’une l’Allemagne de l’Est qui avait des liens privilégiés avec l’ANC sud-africaine et de nombreux autres mouvements soutenus par le camp soviétique (Éthiopie, Mozambique, Guinée). Afin d’éviter de « saupoudrer » son aide au développement, l’Allemagne a procédé à partir de 1999 à un recentrage sur quelques pays phare tels l’Afrique du Sud, le Kenya, le Ghana ou l’Éthiopie, tout en gardant des ambassades dans de très nombreux États africains.
Berlin et l’Afrique : la sortie progressive du prisme du « tout-développement »
Aux sources d’une position originale
La conscience croissante du besoin d’actions sécuritaires
Un cadre stratégique rénové
Une approche morale qui conditionne l’engagement multilatéral
Le poids de l’opinion intérieure
L’ambiguïté révélatrice de la relation franco-allemande sur l’Afrique
Afrique, Allemagne, franco-allemand